Propos liminaires : la pensée du labo

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Texte

Figure 1 : L’équipe de In Cookies

Figure 1 : L’équipe de In Cookies

Laboratoire moteur de recherche au Pavillon Mazar

© Céline Maufra

La petite histoire du labo

Journal d’une cookizée (extraits, septembre 2020) (Marie-Laure Hée)

Pourquoi les cookies?
Les cookies et les spams, ça taraude
Et c’est très intéressant.
Parce que cela relève avec le numérique, le web, les big data, etc. d’un bouleversement technologique majeur et profond,
Parce que le numérique remet en question le partage entre l’intimité et la publicité, le secret et soncontraire, etc,
Parce qu’il opère le contrôle non par l’isolation mais par l’interconnexion et l’hypercommunication,
Parce que ça interroge l’identité, la transparence, le subjectif et l’inter-subjectif, le consentement, etc,
Parce que ce bouleversement affecte tout, tous les domaines de notre vie, mais surtout le à la fois de l’intime et du politique,
Parce que ça bouleverse le rapport à soi et à ses propres pratiques (exemples du quantified self, du BPS best possible self, de l’e-suicide, etc.), le rapport aux autres et le rapport au monde.
Etc.
Pourquoi ça nous semblait pouvoir intéresser un labo de recherche en création théâtrale?
Parce que ça nous intéresse que le théâtre puisse s’emparer de questions à la fois subjectives et politiques (par exemple, la question du consentement « à quoi consentons-nous quand nous acceptons les cookies ? »).
Parce que c’est inquiétant, cette histoire de cookies.
« Suffisamment inquiétant ».
Parce que cette thématique pour un labo de recherche en théâtre fait jouer une tension entre ce qui peut paraître abstrait -l’abstraction des algorithmes, la dématérialisation, « la spectralité, la 2D » comme dit Élise Van Haesebroeck - et la dimension concrète, sensible d’un art vivant et organique.
Parce que ce peut être l’occasion de réinterroger la convocation d’un public et les interactions entre « acteurs » et « spectateurs ».
Parce que ce peut être intéressant d’expliciter l’implicite. Qu’est-ce qui se passe quand « j’accepte » ? Qu’est-ce qui me revient dans la figure ? Qu’est-ce que ça me fait ? Qu’est-ce que ça fait de moi ? Qu’est-ce que ça dit de moi ? Qu’est-ce qui se passe dans ces bulles de boucles rétro-actives ?
Parce que le profilage, c’est la création de persona et de fictions et que l’on peut peut-être en faire quelque chose au théâtre.
Parce que ça peut interroger les voix et les adresses.
Parce que ça peut interroger la langue, les langues, les virus de la langue, mais aussi le silence et les vibrations du silence.
Et puis, parce que ça pose la question de ce qui échappe et de l’imprévisible.
De limprovisation?
Mais bon, les cookies « c’est complètement abstrait ».
Donc, il y a du pain sur les planches.
Il y a du travail entre la table et le plateau.

Horizontalité et partage de questions

Processus


prendre 10-15 mn à la table pour écrire chacun·e, avant de partager par un tour de table :
- 29 juin 2020 : quelle question nous posons-nous?
- 21 octobre 2020 : quelle forme prend ma récalcitrance à la traçabilité numérique?
- 21 octobre 2020 : quels sont nos intraçables? quels sont les intraçables du labo?

pourquoi comme ça?
pour, à l’horizontalité de la table, prendre le temps de réfléchir,
pour prendre le temps d’écrire,
pour ne pas se contaminer et se laisser contaminer,
pour s’écouter,
pour garder des traces de nos réflexions,
&
ça repose des discussions!

Partage de questions (In Cookies Team)

#1
Chacun baigne, surfe et plonge dans un aquarium de données numériques qui se remplit pour lui, au fur et à mesure ; poisson-rouge entre les parois de verre, agité des nageoires, perturbant la soupe digitale à chaque mouvement, remontant les substrats déposés, libre, il vit, il voit, il va, n’est-il pas fascinant ?

#2
Quand je me connecte, qu’est ce qui se déconnecte ?

#3
Si derrière tout cela il n'y a pas de déterminisme d'un grand projet, quel chemin anthropologique on va emprunter ?

#4
L’évolution du rapport entre l'humain et le numérique est-il vecteur de progrès social ? Politique ? Humain ?

#5
Comment, collectivement, l’espace-temps artistique peut-il mettre en jeu la constellation de sens de l'espace temps-numérique ?

#6
En marche de quoi sommes-nous ?
Marchons-nous à côté de nous-même ?
A quelle point de disparition de nous-même en sommes-nous ? Sommes-nous voués à disparaître ? Si oui, que / qui restera-t-il pour en témoigner ?

#7
Quelles sensations nous donnent les cookies alors qu'ils sont sans sensation ? ou pas

#8
Comment brouiller les pistes ?
Est-il possible de disparaître sans se supprimer ?

#9
Où est mon corps sujet numérique ?

#10
La surface glacée sur laquelle j’évolue ressemble à une patinoire olympique fraîchement lissée, les circonvolutions que je dessine ne dépendent que de mon énergie et mes douleurs. Un courant de gaz liquide coule dans ces circuits souterrains, ils coulent dans mes jambes, mes reins, ils pompent dans ma poitrine, je suis indexé sur un cloud liquide qui me tient debout je glisse et tente de ne pas tomber.

#11
Question perso
Suis-je rattrapable sur mon île?
L’îlot d’imprévisibilité et d’insularité fondé sur la fidélité à l’enfance est-il récupérable?
Question philo
Assujettissement ou subjectivation?
performativité ou performance du je(u)?
Question du projet
on cherche une forme
pour le moment on cherche des formes et des matériaux pour jouer les tensions entre
d’un côté les boucles rétro-actives entre données et suggestions, entre données et injections-injonctions, cookies et spams,
et d’un autre côté l’imprévisibilité, les résistances, les échappées, les espace-temps d’échappée

Illustrations

Citer cet article

Référence électronique

In Cookies Team, « Propos liminaires : la pensée du labo », Plasticité [En ligne], 05 | 2023, mis en ligne le 09 juillet 2023, consulté le 03 mai 2024. URL : http://interfas.univ-tlse2.fr/plasticite/675

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In Cookies Team

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