Musiques trouvées dans le Théâtre de la Mort de Tadeusz Kantor

L’article se donne pour objectif de réfléchir aux divers types de musiques utilisées dans le Théâtre de la Mort de Tadeusz Kantor, d’analyser leurs fonctions dans l'économie des œuvres et, plus largement, de dégager le sens de leur présence au sein de l’univers théâtral kantorien. La notion de musiques trouvées, utilisée dans le titre, est ici à comprendre dans une triple acception. Elle renvoie tout d’abord à des musiques prêtes, littéralement trouvées par Kantor dans l’espace sonore extra-théâtral et insérées dans ses spectacles, dans une logique à la fois de continuité et de polémique avec les esthétiques des avant-gardes modernistes. Mais elle renvoie aussi à un travail musical proprement dit qui consiste à créer des musiques spécifiques à partir des phénomènes et des effets acoustiques émis au cours du spectacle : c’est ce que nous appelons les musiques concrètes de Kantor, en les associant aux expérimentations des compositeurs comme Pierre Schaeffer ou John Cage. Enfin, elle renvoie à une structuration spécifiquement musicale des spectacles kantoriens, qui fait clairement penser à leurs filiations constructivistes et que le spectateur-auditeur peut y trouver à son tour, s’il se laisse guider par la figure de Kantor-chef d’orchestre. Proposant une analyse de ces trois modalités de musiques kantoriennes, l’étude montre comment celles-ci sont investies dans des problématiques bien plus larges et essentielles du Théâtre de la Mort : celles des rapports entre le temps linéaire de l’Histoire et le temps cyclique du rituel, entre l’emprise du collectif et l’expérience individuelle, entre la mémoire et la création.