Nikolaï Fiodorov et son projet pour le salut de l’humanité

Le grand projet de Nikolaï Fiodorov pour vaincre la mort et ressusciter les générations passées par des moyens scientifiques et techniques vise à la création d’un « paradis » qui éliminerait l’aporie inhérente à toutes les théories séculières du progrès aussi bien que la croyance chrétienne en une existence dans l’au-delà. Créée par l’humanité réunie sans l’assistance divine, ce « paradis » est essentiellement immanent ; il n’y aura plus ni « damnés » ni « victimes de l’histoire ». En toute cohérence, les théologiens rejettent la « religion de l’humanité » prêchée par Fiodorov comme étant incompatible avec la conception chrétienne du péché, de la mort et de la rédemption, tandis que les transhumanistes font erreur lorsqu’ils se réfèrent à lui dans leurs aspirations à l’auto-optimisation et à une immortalité personnelle. Si l’on néglige le fondement éthique du projet de Fiodorov, il se réduit à un simple texte, certes captivant, de science-fiction, à un exemple spectaculaire de pensée imaginative. Pour éviter cette approche réductrice, nous devons nous concentrer sur l’impulsion principale qui anime la pensée de Fiodorov : l’obligation inconditionnelle de contribuer au salut de toutes les générations passées et de payer notre dette envers les « victimes de l’histoire ».