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Texte

Ce numéro XXXIV – 1&2 de Sociocriticism paraît dans les circonstances extrêmement douloureuses de la disparition, le 2 novembre 2019, d’Edmond Cros, fondateur de la revue en 1985.

Premier de la troisième période de Sociocriticism1, ce numéro manifeste d’abord un engagement collectif vis-à-vis du patrimoine que représente cette revue, pour les positions scientifiques qu’elle porte et qui réunissent les membres de l’école montpelliéraine instituée par Edmond Cros, à l’origine du réseau que compose l’Institut International de Sociocritique. Il symbolise à la fois l’actualité de la ligne éditoriale initiale dans laquelle nous nous reconnaissons et que nous souhaitons poursuivre, démontrant, au-delà de la perte qui nous accable, la pérennité d’un questionnement, d’une pensée et d’une pratique que continuera d’incarner Edmond Cros, pour celles et ceux d’entre nous qui avons eu le privilège de travailler à ses côtés.

Conçu comme un numéro de transition entre la deuxième et la troisième période, il propose une sélection de contributions centrées sur la notion de représentation – fondamentale pour la sociocritique – issues des travaux présentés lors du XVIIe Congrès de l’Institut International de Sociocritique qui s’est déroulé à Montpellier les 20, 21 et 22 juin 2018. Ce fut le dernier Congrès auquel participa Edmond Cros.

Ce trente-quatrième Sociocriticism, bien qu’il n’ait évidemment pas été pensé comme un hommage à son fondateur2, inclut néanmoins, grâce à la générosité de Milagros Ezquerro et Michèle Ramond, ses amies et complices de toujours, deux éloges dont la sincérité émue exprime ce que beaucoup d’entre nous ressentons. Nous les en remercions vivement. Il inclut par ailleurs une contribution du précédent responsable de la revue, Antonio Chicharro Chamorro de l’université de Grenade, qui constitue, à travers l’analyse qu’il propose des travaux d’Edmond Cros publiés dans Sociocriticism de 1985 à 2018, un hommage à la pensée de son fondateur.

L’objectif de ce numéro de transition était d’indiquer l’importance des aires culturelles hispaniques et hispano-américaines dans les travaux de l’école montpelliéraine et de marquer à la fois les dialogues qu’elle n’a cessé de nouer avec l’école de Montréal. Les livraisons suivantes devraient nous permettre de mettre en valeur d’autres corpus – les pratiques artistiques militantes, le cinéma, par exemple – et d’autres aires culturelles – les Caraïbes, les diasporas africaines et afro-descendantes, entre autres – analysés à la lumière des débats issus d’une critique matérialiste de la culture. Les contributions recueillies ici ne rendent donc compte qu’en partie de la diversité des démarches et des corpus considérés, elles exposent cependant les multiples perspectives à partir desquelles la sociocritique interroge les régimes de représentation ainsi que leurs rapports aux processus historiques en jeu dans les sociétés considérées.

Avant de présenter ces articles, je voudrais réexaminer brièvement deux orientations possibles de la critique des représentations. Dans les théories mimétiques, la notion de représentation suppose l’existence d’une réalité antérieure et extérieure aux moyens par lesquels elle est représentée. Les codes réalistes ou naturalistes qui accompagnent ces perspectives tendent à nous faire oublier qu’ils existent en tant que processus de codage, en effet, ils postulent une sorte de degré zéro de la représentation. Toutefois, dans ce type de représentations « ce n’est pas qu’aucun code n’est intervenu mais plutôt que ces codes ont été profondément naturalisés. » (Hall, [1973] 2017, p. 258) Le travail de la pensée critique intervient ainsi en tant que code oppositionnel (Ibid., p. 267) chargé de désamorcer le décodage consensuel, révélant ainsi les intérêts de classe et la reproduction de l’ordre social inscrits dans les « systèmes de représentations3 ». Il insiste sur les conflits qu’effacent les systèmes de représentation dominants et explore la fonction idéologique de la culture. « En revanche », si l’on en croit Granjon :

il est nettement plus rare qu’elles [les théories critiques] présentent, en parallèle, des conceptions aussi travaillées des dynamiques émancipatoires dont on serait pourtant en droit de penser qu’elles devraient constituer l’autre face de tout dispositif critique, complétant ainsi le travail du négatif par une pensée de la mise en capacité et de l’habilitation. (Granjon, 2015, p. 11)

Afin d’expliciter la présence de ces deux orientations dans la ligne éditoriale que nous adopterons : critique des codes naturalisés mais également mise en lumière des dynamiques émancipatoires, je reviendrai d’abord sur certaines propositions d’Edmond Cros.

Représentation et morphogénèse

Un fragment issu d'un texte intitulé « La notion d'idéosème4 » – publié dans La sociocritique d'Edmond Cros me permettra d'introduire cette réflexion sur la représentation menée par la sociocritique. Il fonctionne de façon synthétique car il reprend les travaux antérieurs d'Edmond Cros et expose en premier lieu la fonction des représentations dans le foyer programmateur de la morphogenèse, autrement dit dans le « processus de transcodage en des structures textuelles des structures socio-discursives qui sont à l’œuvre dans le hors-texte5 ».

L’hypothèse de travail dont je suis parti, et qui m’a été elle-même proposée par des analyses de textes préalables, est que la chaîne de représentations, ou plutôt leur emboîtement, qui se donne à voir dans un texte, prend son origine dans une ou dans des représentations qui sont à l’extérieur du texte et qui peuvent ne pas être de nature discursive. Arrivé à ce point, je dois préciser que je ne me réfère pas seulement à des représentations qui pourraient être présentées en termes d’intertextes. Ces dernières correspondent, dans mon esprit, à des représentations déconstruites par d’autres représentations qui gèrent la dynamique de la production de sens. Je me demande, à la réflexion d’ailleurs, si le terme d’intertexte est ici approprié. Je l’utilise par habitude ou par commodité mais je pense que dans le cadre de mes réflexions le terme de représentation est préférable dans la mesure où l’intertexte, tel qu’on le conçoit généralement, peut être considéré comme une représentation tandis qu’une représentation déconstruite par l’écriture n’est pas forcément un intertexte mais peut correspondre – c’est à plusieurs reprises le cas dans les analyses que je présente – à une pratique discursive, voire à une pratique sociale. (Edmond Cros, « La notion d'idéosème », 2007)

La notion de représentation telle qu'elle apparaît dans le fragment cité fonctionne dans les travaux d’Edmond Cros qui cherchent à interroger les modalités d'inscription du social dans la culture à partir de l'analyse des processus de morphogenèse, autrement dit de l'engendrement des formes – littéraires mais aussi picturales, cinématographiques, médiatiques, etc. Il convient de revenir sur les propositions de Théorie et pratique sociocritique (Cros, 1983) pour resituer les positions initiales et fondatrices de la sociocritique. À travers l'analyse des phénotextes, autrement dit des phénomènes textuels concrets et observables dans la matérialité du texte, les sociocriticien·es se proposent de reconstruire le génotexte6. Le texte est entendu ici au sens (extensif) de résultat stabilisé sur un support matériel d'une pratique signifiante. Le génotexte est donc le résultat de la série de procédures d'abstraction produites par l'analyse qui s’emploie à reconstruire ce qu’elle postule en tant que matrice complexe, « foyer génétique », « structuration dynamique à dominante variable » (Ibid.) où se donnent à lire les articulations qui caractérisent une formation discursive.

L'hypothèse, issue de la pratique sociocritique, est que l'emboîtement de représentations que l'on observe dans un texte – les phénotextes – est surdéterminé par « une ou des représentations qui sont à l’extérieur du texte et qui peuvent ne pas être de nature discursive » (Ibid.). Ainsi conçues dans le cadre d'une exploration de l'engendrement socio-idéologique des formes, les représentations sont supposées participer de cet engendrement à plusieurs niveaux : celui, extra-textuel, qui surdétermine leur fonctionnement dans le texte, celui des processus de déconstruction à l'œuvre dans les pratiques signifiantes où elles apparaissent à la fois en tant qu'intertexte, cité et déconstruit, et en tant que matérialisation des conflits présents dans l’interdiscours qui « gère la dynamique de production de sens » (Ibid.). Dans les trois cas, les représentations sont des « ensembles gérés par des systèmes d'articulation » (Ibid.).

Revenons un instant sur un schéma publié dans Théorie et pratique sociocritique (Cros, 1983, p. 108) que je reproduis plus bas, en y insérant les représentations ainsi que les phénotextes (en orange7). Voici d’abord la description qu’en donne Edmond Cros dans son ouvrage Genèse socio-idéologique des formes :

J’utiliserai ici une métaphore spatiale en suggérant d’imaginer le point d’intersection de deux axes, un axe vertical et un axe horizontal. Plaçons sur le premier l’interdiscours qui matérialise, répétons-le, à la fois les structures mentales et les formations idéologiques produites par une formation sociale. Sur cet axe se lit le discours du temps sur le temps, ou, dit autrement, cet interdiscours traduit en opérations sémiotiques, à travers de multiples tracés idéologiques, les conditions socio-historiques dans lesquelles se trouve immergé un locuteur. On situera à l’opposé, sur l’axe horizontal, l’intertexte, le préasserté, le préconstruit, le précontraint, c’est-à-dire tout le matériau langagier destiné à matérialiser le sens et à l’informer. Sur ce nouvel axe, comme sur le premier d’ailleurs, se trouvent des trajets de sens préétablis qui vont offrir une résistance plus ou moins grande à la modélisation textuelle, au sein de laquelle ils maintiendront des îlots sémiotiques, des micro-espaces de lecture, susceptibles d’engendrer sous l’effet de l’éventuel projet monosémique de l’instance narrative, des zones conflictuelles. (Cros, 1998, p. 85)

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À plusieurs reprises Edmond Cros observera l’incidence différentielle des représentations en distinguant « celles qui se déconstruisent dans l’écriture de celles qui impulsent et génèrent les déconstructions » (Cros, 2007). Les premières se situent sur l’axe horizontal, les secondes sur l’axe vertical. Dans les effets des secondes, il analysera les processus de stockage de l’information concernant le contexte d’écriture et ses contradictions idéologiques, valorisant ce qu’il nomme la « mémoire vive » du texte à laquelle la reconstruction de la morphogénèse permet d’accéder (Cros, 1992).

Si l’objet de la sociocritique est le texte – littéraire, iconographique, cinématographique, médiatique – celui-ci s’inscrit dans une institution, ses pratiques et ses discours, et à la fois dans un continuum historique de systèmes de représentation qui structurent différents discours, différentes pratiques discursives et sociales. Il est possible d’évoquer dans cette configuration, et sur un autre registre, la notion de « structures structurantes » proposée par Pierre Bourdieu, qui désignait ainsi, à partir de la sociologie, la façon dont les représentations participent à la structuration des rapports sociaux en leur donnant du sens, à travers les systèmes de valeur qu’elles matérialisent et diffusent, et qui fonctionnent en-deçà de la conscience claire, dans les habitus incorporés qui façonnent notre corps, nos rapports aux autres et au monde (Bourdieu, 1997, p. 201-211).

Comme nous l’avons signalé plus haut, avec le renouvellement qu’elle formule de la notion de représentation la sociocritique s’inscrit dans une pensée critique dont les divers courants partagent – au-delà des divergences et des contradictions qui renouvellent les débats – des fondements matérialistes (Granjon, 2015). La pensée matérialiste à partir de laquelle s’est construite la sociocritique s’emploie en effet à démystifier, à historiciser et dénaturaliser l’ordre social ; elle participe en cela à une entreprise émancipatrice. Elle met l'accent sur les logiques structurelles qui organisent la production culturelle et que celle-ci articule en retour, afin de construire un appareil théorique qui rende compte des rapports socio-historiques. Néanmoins son propos n’est pas pour autant de figer ces derniers, bien au contraire, puisqu’il s’agit de les rendre sensibles dans leur fonctionnement contradictoire et dynamique. Elle paraît cependant s'attacher en premier lieu à décrire les ressorts de la reproduction sociale, au risque d’être accusée d’effacer ou de réduire la capacité d'agir des groupes sociaux dominés ou marginalisés (Bourcier, 2005, p. 115-130).

Politique des représentations, politique de la critique

À mes yeux, les événements, les rapports sociaux et les structures ont des conditions d'existence et des effets réels en dehors de la sphère du discursif ; mais c’est seulement à l’intérieur de celle-ci, alors qu’ils sont sujets à des conditions, limites et modalités spécifiques, qu’ils sont ou peuvent être construits à l’intérieur de la signification. Ainsi, sans vouloir étendre indéfiniment le territoire du discursif, la manière dont les choses sont représentées ainsi que les « machineries » et régimes de représentation à l'intérieur d'une culture ne jouent pas un rôle purement réflexif et rétrospectif, mais réellement constitutif. » (Hall, [1989] 2017, p. 402).

La pensée critique matérialiste a été révisée et réorientée par les études culturelles, des épistémologies féministes, queer, antiracistes, postcoloniales et décoloniales (Cervulle, Quemener, Vörös, 2016). Il est impossible d’évoquer ici tous les travaux que nous pourrions commenter pour exposer les discussions qui ont animé ces champs pendant ces cinq dernières décennies, des travaux du Center for Cultural Studies de Birmingham8, aux Subaltern Studies9, du féminisme matérialiste – Nicole Claude Mathieu (1991), Colette Guillaumin (1992), Christine Delphy (1998 ; 2001), Paola Tabet (1998 ; 2004) – aux queer studies – Monique Wittig (2001), Gayle Rubin (2010), Teresa de Lauretis (2007), Eve Kosofsky Sedgwick (2008), Sam Bourcier (2018) – en passant par le Manifeste contra-sexuel de Paul B. Preciado (2000) et la King Kong théorie de Virginie Despentes (2006). Ou encore, de l'intersectionnalité exposée par Angela Davis (2007), Kimberlé Williams Crenshaw (1995 ; 2005), bell hooks (2015 ; 2017), Audre Lorde (2007), Patricia Hill Collins (1990 ; 2016), à la performativité de Judith Butler (2005), au féminisme « métis » de Gloria Anzaldúa (1987), Silvia Rivera Cusicanqui (2010) ou Maria Luisa Femenías (2007 ; 2012)10.

Faute de pouvoir rendre compte des multiples aspects de cette réorientation, opérons un retour vers le Manifeste Cyborg de Donna Haraway (1985), et son ironique tableau, susceptible de nous procurer quelques raccourcis :

Représentation.....................................................................Simulation
Roman bourgeois, réalisme.................................................Science-fiction, post-modernisme

Organisme............................................................................Composant biotique

Profondeur, intégrité ............................................................Surface / Limite

Chaleur..................................................................................Bruit
Biologie comme pratique clinique.......................................Biologie comme inscription Physiologie............................................................................Engénierie de la communication

Petit groupe............................................................................Sous-système

Perfection.............................................................................Optimisation

Eugénisme.............................................................................Contrôle démographique

Décadence, La Montagne magique .......................................Obsolescence, Le Choc du futur

Hygiène.................................................................................Gestion du stress

Microbiologie, tuberculose.....................................................Immunologie, SIDA

Division organique du travail................................................ Ergonomie / cybernétique du travail
Spécialisation fonctionnelle ..................................................Construction modulaire

Reproduction .........................................................................Réplication
Spécialisation organique, génétique.......................................Stratégies d’optimisation des rôles sexuels
Déterminisme biologique.......................................................Inertie évolutive, contraintes

Écologie communautaire..................................................Écosystème
Chaîne raciale du vivant...................................................Néo-impérialisme, humanisme des Nations-Unies Organisation scientifique de la maison / de l’usine...........Usine planétaire / Maison électronique
Famille / marché / usine......................................................Femmes dans le circuit intégré

Salaire familial ...................................................................Valeur comparable
Public / privé.......................................................................Citoyenneté cyborg
Nature / culture....................................................................Champs de différence

Coopération ........................................................................Amélioration de la communication

Freud ...................................................................................Lacan

Sexe......................................................................................Génie génétique
Travail .................................................................................Robotique

Esprit.....................................................................................Intelligence artificielle
Seconde guerre mondiale......................................................Guerre des étoiles
Patriarcat capitaliste blanc.....................................................Informatique de la domination

(Haraway, 2007, p. 48-50)

Cette liste qui ouvre son argumentation sur « l’informatique de la domination » commence par le mot Représentation. Elle inaugure la colonne qui correspond aux « bonnes vielles dominations hiérarchiques ». La seconde colonne, quant à elle, recense les notions qui se sont substituées à celles qui composent la première et identifient « l’informatique de la domination » (Haraway, 2007, p. 48-50). Haraway constate que « les objets qui composent la colonne de droite ne peuvent être codés comme “naturels“, ce qui subvertit l'encodage naturaliste de la colonne de gauche » (Ibid.). Comme « nous ne pouvons revenir en arrière », après avoir glosé les éléments de la colonne de droite, elle indique que la figure du cyborg peut devenir un mythe de l'identité politique hybride, faite de connexions partielles issues de situations concrètes. Selon Laurence Allard :

Le Cyborg d’Haraway, les « Autres Inapproprié/es » de Trihn Minh-ha, le « Ne suis-je pas une femme? » de Soujourner Thruth, le « ce que nous ne pouvons pas vouloir » de Spivak, les « sujets excentriques » de Teresa de Lauretis représentent autant de figures venant brouiller, tel le trickster, toutes nos représentations, sans exception, de l’humanité – classiques, bibliques, scientifiques, modernistes, postmodernistes et féministes. (Allard, Préface, Haraway, 2007, p. 24)

Le cyborg, ou la cyborg, ou simplement Cyborg (Larue, 2018, p. 29-30), est donc une métaphore épistémologique inspirée des féminismes afro et latino-américains, des féminismes de couleur, des féminismes métis, des féminismes lesbiens, et des récits ironiques et politiques de la science-fiction féministe. Renversant la « pollution technologique » et les menaces de « l’informatique de la domination », Haraway propose d’interpréter ces dernières en tant que connexions déjà là qui informent notre potentiel de survie. Plutôt que de n’en considérer que les aspects effrayants, elle nous engage à reconnaître les possibilités ouvertes par la dissolution des différences et l’abandon volontaire des grands mythes occidentaux d’unité, d’innocence et de pureté originelle. Enfin, l’une des tâches de Cyborg qui subvertit les bi-catégorisations du discours naturaliste (nature / culture ; humain / animal ; humain / machine ; homme / femme ; sauvage / civilisé ; etc.) est l’écriture cyborgienne :

L’interprétation de l’écrit a été un enjeu capital de la lutte politique contemporaine. Montrer le jeu de l’écriture est quelque chose de tout à fait sérieux. La poésie et les histoires des femmes de couleur américaines traitent constamment de l’écriture et de l’accès au pouvoir de signifier; mais alors ce pouvoir ne doit plus être ni phallique, ni innocent. L’écriture cyborgienne ne doit pas avoir trait à la chute, à l’idée d’une unité qui aurait existé autrefois, avant le langage, avant l’écriture, avant l’Homme. L’écriture cyborgienne a trait au pouvoir de survivre, non sur la base d’une innocence originelle, mais sur celle d’une appropriation des outils qui vous permettent de marquer un monde qui vous a marqué comme autre. (Haraway, 2007, p. 71)

En 1985, Haraway prenait acte d'un changement11 que relevait, dans un autre cadre, Stuart Hall. Celui-ci décrivait ce changement comme le passage d'une lutte dans les relations de représentation à une politique des représentations (Hall, [1989] 2017, p. 402). Hall et Haraway – entre autres – consignaient ainsi la « fin de l'innocence ». Il n’y a plus de « bonnes représentations », plus vraies, plus proches d'une réalité sociale préexistante, plus transparentes, qui s’opposeraient à de « mauvaises représentations », fausses, aliénantes. Il y a des constructions performatives des réalités sociales réalisées à partir de positions diverses, mais non équivalentes. La fin de l'innocence, c’est en premier lieu la fin de ce que Haraway nomme le « témoin modeste », le scientifique qui se prétend « porte-parole transparent des objets » (Haraway, [1996] 2007, p. 313). Mais c'est également la fin de l'innocence des groupes dominés, des « femmes », des « noirs ». bell hook reprend dans son essai de 1981 (hooks, 2015) la question de Sojourner Truth : « Ain’t I a Woman ? » ; dans son discours, l'abolitionniste noire, ancienne esclave, interpellait ainsi le public de la Women's Convention de 1851. Cent trente ans plus tard, les féministes noires états-uniennes, comme les chicanas, dénoncent à nouveau les oppressions croisées que les luttes féministes et les luttes antiracistes rendent visibles, et nous interrogent : qu'est-ce qu'une femme ? All the Women Are White, all the Blacks Are Men. But Some of Us Are Brave, tel est le titre de l’anthologie des Black Women's Studies (Hull, Bell-Scott, Smith, 1982). Car la « lutte pour le sens » n’est pas seulement observable dans les textes, elle existe déjà dans le signe lui-même dans lequel se joue « l’affrontement d’intérêts sociaux contradictoires » (Bakhtine - Voloshinov, 1977, p. 44).

Cette lutte ne se limite donc pas à l’arène où se déploient les discours publics reconnus comme tels mais déborde ces espaces et se joue dans leurs marges, où elle devient une « lutte pour l'accès aux moyens même de la signification » (Hall, 2017 : 238). La façon dont les problèmes sont posés, définis, les cadres qui dessinent les contours des questions pertinentes et les hiérarchisent, excluent d'avance de l'autorité discursive les minorités supposées non « représentatives », alors que leurs discours retournent et réarticulent les stigmates, déstabilisent les binarismes et les catégories naturalisées, les genres discursifs et les frontières disciplinaires, « marquent un monde qui les a marqués comme autres ».

Or cette « politique des représentations » implique que la critique, elle aussi, perde son innocence, exige une politique de la critique (Hall, 2017, p. 410). Dans le cadre des études littéraires, cinématographiques et médiatiques où nous nous sommes situé·es, opérer une critique des textes canoniques ou supposés avant-gardistes – autrement dit, dans la plupart des cas, élitistes, masculinistes, blancs, chrétiens – et de l'idéologie qui les structure, contribue sans doute à les désacraliser, à relativiser leur portée, leur valeur. Néanmoins cette opération stabilise paradoxalement l’autorité du cadre discursif dans lequel ces textes fonctionnent, favorise sa clôture et reconduit les exclusions qui le soutiennent. Par ailleurs, au-delà du contenu de la critique proposée, celle-ci, en tant que glose, va ajouter sa contribution à l'accumulation déjà conséquente de capital symbolique et d'autorité que les citations et la sélection d'un objet d'étude produisent.

Les différents courants de la sociocritique, si l'on en croit l'article de synthèse que nous devons à Pierre Popovic (2011), n'adoptent pas nécessairement la même conception du fait littéraire, des institutions et des pratiques qui le définissent. De ces divergences peuvent résulter des positionnements critiques différents : s'agit-il de valoriser certains textes considérés comme plus « littéraires » que d'autres, plus denses, plus complexes, plus contradictoires et donc mieux à mêmes de rendre compte de leur contexte d’énonciation ? S'agit-il de sonder le positionnement idéologique hégémonique adopté, au-delà des contradictions qui travaillent le texte ? S'agit-il de mettre en lumière des textes que la critique littéraire a négligés ? S’agit-il de débusquer les traces de discours contre-hégémoniques oubliés dans les monuments littéraires dont les contours ont été polis par le temps ? Ou encore s'agit-il de reconnaître une valeur épistémologique aux processus sémiotiques observés, comme le suggère Donna Haraway ? Autant de questions portant sur les responsabilités politiques de la critique que les livraisons à venir de Sociocriticism pourront aborder.

La Représentation au XVIIe Congrès de l’IIS

Le numéro que nous proposons ici réunit dix travaux dont les avancées ont été présentées lors du XVIIe Congrès de l’Institut International de Sociocritique. Elles n’exposent qu’une partie de la multiplicité des approches que la sociocritique met en œuvre et des corpus qu’elle interroge. Après un bilan des travaux d’Edmond Cros publiés dans la revue, réalisé par Antonio Chicharro, les contributions d’Edmond Cros et d’Antonio Gómez Moriana tracent les contours des études recueillies ensuite, en interrogeant les régimes de représentation et leurs rapports aux processus historiques.

Antonio Chicharro a dirigé la revue Sociocriticism de 2006 à 2018. Titulaire de la chaire de Théorie Littéraire de l’Université de Grenade, il a partagé pendant de nombreuses années les questionnements portés par Edmond Cros et organisé à Grenade le XIIe Congrès de l’Institut International de Sociocritique en 1999 et le XVIe en 2016. Dans « La revista Sociocriticism y la teoría sociocrítica de Edmond Cros » Chicharro revient sur l’histoire de la revue, et en particulier sur le numéro XXI-212 qui marque la transition entre la première et la deuxième époque, intitulé « Pasado y presente de la revista ». Il renvoie à la présentation d’Edmond Cros qui évoque les origines historiques de la sociocritique, fondée sur une pratique universitaire collective, pluridisciplinaire, égalitariste et anti-hiérarchique, issue des mouvements de 1968, ainsi que sur l’illustration des couvertures, commune aux revues Imprévue et Sociocriticism et à la collection Co*textes. Celle-ci joue sur un effet de trame du Capricho No24 de Goya : « No hubo remedio », afin de mettre en lumière la tension entre les deux états de l’énoncé postulés par Edmond Cros que j’ai évoqués plus haut13. Dès sa fondation, Sociocriticism se définit comme un « moyen d’institutionnaliser, de renforcer et de réorienter les études sociocritiques » et Antonio Chicharro – comme le Capricho No 24 – indique l’une des spécificités de la ligne initiée par Edmond Cros : à partir de ses travaux en littérature comparée sur la picaresque il va développer une école dans laquelle les corpus hispaniques et hispano-américains auront une importance majeure. Cependant, et avant tout, il va ouvrir un espace de dialogue semblable au « séminaire expérimental (anglais, espagnol, français)14 » qu’il animait dans les années 70, où les études littéraires croiseront les études cinématographiques et, plus largement, tous les domaines de la critique des processus de morphogénèse dans le champ culturel, instituant une distance par rapport aux approches sociologiques mais rompant à la fois avec les poétiques strictement formalistes. Le texte qu’Antonio Chicharro nous a confié pour ce premier numéro de la troisième période met en valeur à la fois les contributions d’Edmond Cros à la sociocritique et les différents domaines d’étude qu’il a abordé à partir d’une analyse attentive de ses articles publiés dans Sociocriticism.

C’est avec beaucoup d’émotion que nous incluons dans cette livraison, grâce à Annie Bussière, le texte d’Edmond Cros présenté au XVIIe Congrès de l’IIS : « Le statut de la représentation et son rapport à l’Histoire » dans lequel il étudie, en deçà de la fonction idéologique de la représentation, le cadre discursif que son statut délimite à une époque donnée et qu’il considère comme un dispositif « indexé dans l’espace et dans le temps ». Il reprend dans cet article la notion d’épistémè mise en œuvre par Michel Foucault mais s’en détache, afin de démontrer le caractère sociohistorique des changements épistémiques qu’il évoque, réalisant peut-être ainsi « le pas que Foucault refuse de faire » (Hall, 2012, p. 134). Postulant l’existence d’une matrice sémiotique qui préexiste aux représentations qui s’y investissent, il considère que s’y expose le processus historique évolutif où se stabilise, périodiquement, le statut de la représentation. Il évoque quelques basculements – la découverte de l’Autre dans la lettre de Christophe Colomb à Luis de Santángel, le passage de l’impression à la sensation et de l’art figuratif à l’art abstrait, par exemple – afin de souligner que : « le statut et la fonction de la représentation ne sont pas isolables et qu’ils doivent être questionnés dans le cadre du contexte sociohistorique, ce qui en fait des objets de l’interrogation sociocritique ».

Un questionnement parallèle est mené par Antonio Gómez Moriana, ami et complice de la première heure, qui partagera avec Edmond Cros l’examen des pratiques inquisitoriales et de leur impact – suggéré dans la mise en scène de « No hubo remedio » de Goya. À partir de son analyse du Quichotte de Cervantes, dans « La representación de la representación » Gómez Moriana démontre le schématisme du commentaire qu’en propose Michel Foucault dans le chapitre 3 (« Représenter ») de son essai Les mots et les choses (1966). Sa critique de la notion d’épistémè converge avec celle d’Edmond Cros dans la mesure où il explicite les variations « diatopiques », « diachroniques » et « diastratiques » de la notion de représentation, afin d’insister non seulement sur la problématique spatio-temporelle mais également sur les conflits sociaux que met en jeu le roman de Cervantès et que la notion d’épistémè paraît éluder. Inventoriant différents épisodes où s’expose la dualité des codes et des conventions qui correspondent à deux horizons épistémologiques et axiologiques distincts, il situe la performativité du texte au niveau des lecteur·ices qui pourront se positionner au point d’inflexion où convergent les deux épistémès en conflit.

Une même préoccupation d’indexation spatio-temporelle anime l’article de Jeanne Raimond consacré aux représentations du temps au Moyen Âge. En effet dans « Quelques représentations paradoxales du temps médiéval » elle étudie les convergences et divergences observables dans deux textes du XIIIe siècle : Vida de Santo Domingo de Gonzalo de Berceo et Cantigas de Santa María d’Alfonse X. Dans les contrastes et les comparaisons qu’elle établit entre le moine et le roi, leurs rapports respectifs au « fracas du monde » et au sacré, elle propose de reconnaître les contours d’une temporalité en mutation, encore empreinte de continuité atemporelle mais déjà inquiète d’une instabilité qui doit être conjurée.

Un contexte postérieur est interrogé par Judith Sribnai dans son étude « Représentation et altérité dans Les États et Empires de la Lune et du Soleil de Cyrano de Bergerac ». Elle montre comment la narration et les figures s’emploient à représenter l’inconnaissable mais s’efforcent plus encore de mettre en lumière les limites des perceptions et de l’entendement humain. La saisie mimétique-empathique apparaît alors comme une nouvelle modalité cognitive qui articule et interroge représentation, subjectivité et transmission des savoirs au XVIIe siècle.

Dans la lignée des travaux de l’école sociocritique de Montréal, en particulier ceux de Régine Robin et de Pierre Popovic, Barnabé Wesley dans « Re-présenter le passé : la saisie littéraire de la mémoire collective et la notion de représentation » examine les romans de la trilogie allemande de Louis Ferdinand Céline. Dialoguant avec les hypothèses de Paul Ricœur concernant les rapports entre l’histoire et la mémoire collective, son article examine la représentation de l’amnésie qui affecta la société française d’après-guerre. Son approche d’un exemple de ce qu’il désigne comme « littérature léthéenne » non seulement démontre les processus d’indexation contextuelle sur lesquels insistent Edmond Cros et Antonio Gómez Moriana mais propose en outre de mettre en valeur les écarts qu’opèrent les œuvres singulières.

Un double objectif poursuit l’article « Sociocriticism of science fiction and of its representation in Maurice G. Dantec’s universe » de David Boucher : d’une part la mise en valeur des caractéristiques de la littérature de Science-Fiction et l’intérêt d’une approche sociocritique de ce genre littéraire, d’autre part l’analyse du « catastrophisme » qui hante les récits de Maurice Dantec. L’étude interroge les enjeux politiques, historiques et philosophiques contemporains à l’œuvre dans cet exemple de représentation science-fictionnelle du présent et met en évidence les manifestations d’un « sujet culturel de la décadence » particulièrement prégnant après le 11 septembre 2001. Nous pourrions peut-être considérer que ce sujet culturel et l’apocalypse qu’il met en scène s’emploient à masquer le contrepoint que représentent les « nouveaux sujets » qui peuplent la SF féministe et l’afro-futurisme actuel.

Magali Dumousseau, dans ses « Réflexions autour du concept de álter-retrato dans l’art numérique à partir de l’analyse des vidéos LATEиTE (2018) de Martín Sampedro et Metaversal drawing (2017) de Ray Gropius » examine les déplacements que l’art numérique entend faire subir à la représentation en tant que mimésis d’un visible déjà là, explorant dans les images virtuelles les représentations inconscientes ou non-conscientes et les technologies de construction du visible. Montrant comment ces deux artistes forcent l’artifice pour jouer au cœur des utopies transhumanistes et interroger la réalité du mensonge et de la standardisation, l’article suggère que les limites qu’ils repoussent ainsi – chacun dans le style qui lui est propre – esquissent la revendication des possibilités désinhibitrices d’une alter-représentation.

C’est pour ses réflexions sur la folie que les travaux de Michel Foucault sont à nouveau sollicités dans l’article qu’Assia Mohssine consacre au roman de l’écrivaine mexicaine Ana García Bergua. L’analyse que propose « Locura y sinrazón en Isla de Bobos de Ana García Bergua » questionne la fonction du motif esthétique de la folie et considère qu’il s’inscrit dans un « paradigme interprétatif » de la crise que traverse la modernité mexicaine. L’examen minutieux des différents aspects de ce motif – personnages, action, espace, rapports de genre – révèle le projet critique qui anime la représentation que Bergua construit d’un enfermement destructeur, des résistances qui lui sont opposées et de leur échec.

Un autre type d’interrogation de la norme est en jeu dans les représentations du VIH que produit la presse costaricienne des années 80 auxquelles s’intéresse José Pablo Rojas González. Son article intitulé « La incertidumbre del « mal » : Las representaciones del VIH/sida y de los sujetos vinculados con la « enfermedad », en dos textos publicados en el periódico costarricense La Nación durante la década del ochenta » revient sur le discours journalistique afin de scruter les rapports entre les représentations de la maladie et l’origine hétéronormée de ces représentations, auxquelles commençaient à s’opposer les discours et les pratiques queer minoritaires. C’est l’ébranlement de l’ordre social costaricien des années 80 que décrit cette étude des tensions et des reconfigurations qui affectent les représentations du normal et du pathologique, du public et du privé, dans la presse nationale.

Au nom du comité je remercie vivement les auteur·ices qui nous ont confié leurs travaux, les relecteur·ices qui ont permis la réalisation de ce numéro et j’espère que les vents des Suds nous seront favorables…

Bibliographie

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Notes

1 La revue est maintenant sous la responsabilité d’un groupe d’enseignant·es-chercheur·es de l’université Toulouse – Jean Jaurès. En effet, à la demande d’Edmond Cros, Michèle Soriano et Marie-Agnès Palaisi, en collaboration avec Thérèse Courau et Alexis Yannopoulos, ont présenté un projet soumis au vote de l’Assemblée générale de l’IIS du 22 juin 2018. L’assemblée a délégué la reprise de la revue Sociocriticism au groupe d’études sociocritiques de l’université Toulouse – Jean Jaurès, inclus dans l’unité de recherche CEIIBA (Centre d’études ibériques et ibéro-américaines) qui lui a accordé son soutien. Retour au texte

2 Il a été composé bien avant son décès. Un numéro spécial sera programmé ultérieurement. Retour au texte

3 Pour reprendre la paraphrase des propositions d’Althusser que Stuart Hall (2012) revisite et discute, en particulier les concepts de « surdétermination » et de « contradiction » (Althusser,1996), très présents dans la sociocritique d’Edmond Cros. Retour au texte

4 Edmond Cros, « La notion d’idéosème », La sociocritique d'Edmond Cros, mis en ligne le 9 mars 2007, consulté le 8/06/2018, https://www.sociocritique.fr/?La-notion-d-ideoseme Retour au texte

5 Edmond Cros, « Du contexte sociohistorique aux structures textuelles - Interdiscours et morphogenèse. Quelques précisions sur le processus de transcodage qui est à l’œuvre dans la morphogenèse », La sociocritique d'Edmond Cros, mis en ligne le 24 novembre 2013, consulté le 8/06/2018, https://www.sociocritique.fr/?Du-contexte-sociohistorique-aux-structures-textuelles-Interdiscours-et Retour au texte

6 Edmond Cros explique qu’il emprunte ces deux notions à Julia Kristeva mais distingue l’usage qu’il en propose de celui qu’elle en fait (Kristeva, 1969), en particulier parce qu’il entend à travers ces notions « établir un parallélisme rigoureux entre deux états de l’énonciation qui est particulière à un texte » (Cros, 1983, p. 110). Retour au texte

7 Je rajoute les flèches qui n’apparaissent pas dans le tableau original. Les flèches bleues symbolisent le sens des processus de morphogénèse, les flèches orange celui de la (re)construction du génotexte par l’analyse. Retour au texte

8 Cervulle et Quemener (2015), Maigret et Macé (2005), Hall (2017). Retour au texte

9 Beverley (1999). Retour au texte

10 Cette énumération, déjà trop longue, ne propose que quelques balises dans une constellation extrêmement vaste ; elle privilégie, quand elles existent, les traductions accessibles en français et reste forcément lacunaire. Retour au texte

11 Aujourd’hui, d’autres changements sont en jeu et Haraway formule de nouvelles propositions que nous n’aborderons pas ici (Haraway, 2016). Retour au texte

12 Ce numéro inclut par ailleurs une étude de Rodrigo Pardo Fernández intitulé « Para una biografía de Sociocriticism (I, 1 – XXI, 1 [1985 - 2006]) » qui propose une synthèse de la première période de la revue, et un article d’Edmond Cros : « Spécificités théoriques – état de la question » qui procède à son tour à une synthèse articulant un théorie sociocritique du texte et une théorie sociocritique du sujet. Retour au texte

13 Signalons que pour cette troisième période nous avons décidé de rééditer ce choix, en hommage au projet initial de la revue, bien mis en valeur par Chicharro. Retour au texte

14 Edmond Cros, « Présentation », Sociocriticism Vol. XXI - 2, 2006, p. 12. Retour au texte

Illustrations

Citer cet article

Référence électronique

Michèle Soriano, « Présentation », Sociocriticism [En ligne], XXXIV-1-2 | 2019, mis en ligne le 28 juin 2020, consulté le 29 mars 2024. URL : http://interfas.univ-tlse2.fr/sociocriticism/2715

Auteur

Michèle Soriano

Professeure de culture latino-américaine, Université Toulouse – Jean Jaurès

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