D’une dictature à l’autre. Portugal democrático : la voix des exilés portugais au Brésil dans le jeu des relations internationales (Brésil – Europe – Etats-Unis)

Résumé

Depuis l’installation au Portugal de la Première République, le Brésil s’est imposé comme terre d’exil pour les dissidents portugais : d’abord les monarchistes, ensuite les républicains et finalement les antisalazaristes. Ces derniers trouvèrent dans ce pays le lieu d’accueil qui leur permettait de continuer le combat contre la dictature installée au Portugal. Nombre d’entre eux choisirent de s’exprimer à travers la presse écrite. Le plus connu des périodiques dissidents fut sans conteste Portugal democrático qui ne cessa de faire entendre la voix des opprimés de 1956 à 1975. Dans le domaine des relations internationales tripartites (Portugal-Brésil-USA), le journal n’hésitait pas à dénoncer haut et fort les pratiques salazaristes, plus particulièrement en matière de politique internationale et de politique coloniale. Il fallait toutefois ne pas heurter le pays d’accueil, surtout quand les militaires brésiliens prirent le pouvoir en 1964.

Texte

Le Portugal et le Brésil partagent une même langue, un même univers culturel et une partie importante de leur Histoire y compris de leur histoire politique récente. Ainsi ont-ils connu à des périodes différentes des dictatures sanglantes qui ont duré de longues années. Le Portugal est passé d’une dictature militaire installée par la révolution du 28 mai 1926 à l’Estado Novo de 1933 à 1974. Le Brésil quant à lui connut une dictature homonyme de 1937 à 1945 puis une dictature militaire de 1964 à 1985.

Au Portugal, Salazar se vit d’abord confier la charge de ministre des finances. Au moment de la prise de possession de son ministère, le 27 avril 1928, le futur dictateur déclara : « Sei muito bem o que quero e para onde vou ». Cette phrase prit tout son sens par la suite : il conduisait le Portugal vers l’une des plus longues dictatures nées en Europe au XXe siècle.

Après avoir exercé cette charge, Salazar fut nommé Président du Conseil des Ministres en 1932, mais c’est en 1933 avec la fondation de l’Estado Novo qu’il installa définitivement son pouvoir autocratique pour de très nombreuses années. Bâillonnée, l’opposition démocratique ne pouvait se manifester que dans la clandestinité et nombreux furent les opposants qui préférèrent l’exil pour exprimer librement leurs idées. Pour ces hommes et ces femmes, le Brésil s’imposa d’emblée comme pays d’accueil1 en raison de ses liens historiques, culturels et linguistiques avec le Portugal.

Une fois en terre d’asile, les réfugiés portugais, désireux de continuer le combat contre le régime qui les avait poussés à l’exil, choisirent la presse écrite pour dénoncer l’horreur de cette dictature. C’est ainsi que dès les années 30 de nombreux périodiques se donnèrent comme objectif de combattre le salazarisme. Le plus connu, Portugal democrático, fut fondé en 1956 à São Paulo ; il est unanimement reconnu comme étant le « principal veículo de oposição ao regime salazarista no Brasil e importante pólo congregador dos intelectuais lusitanos que, perseguidos pela ditadura, foram exilados no Brasil »2. Le journal regroupait des antisalazaristes de diverses obédiences politiques, même si les militants communistes étaient, il est vrai, les plus nombreux. Dès le premier numéro, les objectifs de Portugal democrático étaient clairement posés en ces termes :

A política que pretendemos realizar e a missão que temos a cumprir são, pura e simplesmente, servir o Portugal democratico com verdade e independência [...]; mostrar aos portugueses que se interessam por Portugal a real situação do país, destacando a cultura portuguesa; mudar a imagem do país, vencer as barreiras da censura, da falta de dinheiro e de apoio, estamos voltados para o futuro, conscientes das realidades do presente e orgulhosos das grandezas do passado [...].3

Des écrivains, des journalistes, des artistes, des ingénieurs, des hommes politiques participèrent à la renommée de Portugal democrático : Maria Archer, Jaime Cortesão, Adolfo Casais Monteiro, João et Francisco Sarmento Pimentel, Miguel Urbano Rodrigues, Jorge de Sena, Fernando Correia da Silva, Fernando Lemos, Castro Soromenho, Eduardo Lorenço (sous un pseudonyme)4... ; des intellectuels brésiliens renommés comme Lígia Fagundes Telles, Álvaro Lins, Sérgio Buarque de Holanda, Carlos Drummond de Andrade, António Candido... et bien d’autres encore collaborèrent également au journal.

Après des débuts difficiles, Portugal democrático publia sous forme mensuelle deux cent cinq numéros du mois de juillet 1956 au mois d’avril 1975. Le journal fut tout d’abord réservé à une diffusion locale, São Paulo et sa région, mais il se répandit peu à peu à travers le Brésil, pour toucher ensuite les foyers d’opposition à Salazar existants à travers le globe. Il parvint même à se faire connaître au Portugal et en Afrique Lusophone. Comme le rappelle Douglas Mansur da Silva, Portugal democrático se félicitait, dans le numéro d’août 1959, de cette vague antisalazariste qui touchait tous les endroits du monde où était établie une communauté portugaise :

Ninguém duvida também de que a força desse movimento se deve, em boa parte, aos esforços da imprensa democrática mundial, particularmente do Portugal democrático, jornal que a pouco e pouco, foi polarizando a ação dos núcleos democráticos lusos de todos os Continentes, a ponto de se transformar, de fato, no órgão mais eficiente da luta anti-salazarista.5

Au moment où le régime salazariste était accepté par les plus grandes puissances démocratiques (États-Unis, France, Angleterre...) et alors que le Portugal faisait partie des plus grandes institutions internationales, OTAN (1949)6 et ONU (1955), le journal des dissidents portugais montrait au monde le véritable visage de ce régime dictatorial.

C’est une femme, Maria Archer7, qui, dès le 15 février 1957, osa publier dans le journal des dissidents portugais, une longue lettre ouverte à sa Majesté britannique, Élisabeth II (fig. 1), avant le voyage que cette dernière s’apprêtait à effectuer au Portugal8. S’adressant directement à la reine, l’exilée l’accusait d’être la complice d’un régime qui constituait une honte pour les démocraties occidentales :

Evidentemente que sabemos todos, e Vossa Majestade melhor do que nós, que a ditadura salazarista e a ditadura franquista se manteem mercê da protecção de paises democraticos, livres nas suas instituições e nos seus homens, nomeadamente a Grã Bretanha e os Estados Unidos. [...] O seu governo traiu a confiança do aliado de seis seculos e, mesmo depois de se ter batido contra o fascismo pactuou com o governo fascista de Salazar.9

L’impertinence de cette lettre ouverte faisait de Maria Archer une personnalité gênante pour le président brésilien de l’époque, Juscelino Kubitschek, qui entretenait d’excellentes relations avec Salazar. De ce fait, bien que le journal ne fût jamais interdit, il fut néanmoins surveillé à maintes reprises alors même que le Brésil jouissait d’un régime démocratique.

Dès le début de sa présidence, Kubitschek se posa, au sein de l’ONU, comme le protecteur du Portugal et de son régime colonial. Ainsi, lors de la visite du président portugais Craveiro Lopes au Brésil, Kubitschek n’hésita pas à emprisonner des « elementos vinculados ao Partido Comunista Português, que tentavam distribuir panfletos contra o salazarismo durante a estada de Craveiro Lopes no Rio de Janeiro. »10

En vérité, les relations entre les gouvernements portugais et brésilien avaient déjà été consolidées par le Tratado de Amizade e Consulta signé le 16 novembre 195311. L’objectif premier de ce traité était d’harmoniser les politiques extérieures des deux pays, mais il fut surtout utilisé par la diplomatie portugaise pour appuyer sa politique coloniale.

Fig. 1.- Portugal democrático, 15 février 1957 (collection particulière)

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Il ne faut pas oublier qu’en 1953 le Portugal ne faisait pas encore partie de l’ONU ; il avait donc besoin d’un allié au sein de cette organisation, un rôle que le Brésil joua pleinement. Comme le rappelle Waldir José Rampinelli, certains diplomates brésiliens n’hésitèrent pas à défendre ouvertement les intérêts du Portugal dans la presse. Ainsi, l’ambassadeur du Brésil en Belgique, alla jusqu’à affirmer :

Não seria mesmo fora de propósito dizer-se que, acima do tratado de amizade e de consulta assinado pelos nossos dois países, todo o brasileiro é um Português honorário [...]. Atrevo-me mesmo a dizer que, se não fosse a estreiteza de vistas do parlamento de Lisboa em 1822, que queria a todo custo reduzir de novo o Brasil ao estatuto de colônia, nós viveríamos talvez ainda hoje no Reino Unido de Portugal e do Brasil.12

Cette amitié entretenue par le Portugal et le Brésil fut renforcée par une politique commune tournée vers les États-Unis. Ainsi, bien qu’il ait été élu avec l’appui des communistes, Kubitschek fit très vite acte d’allégeance aux États-Unis en ces temps de Guerre Froide.

Quant à Salazar, le 19 janvier 1956, il prononça devant les principaux responsables de l'Union Nationale un discours13 qui le plaçait comme l’un des plus farouches adversaires du communisme en Occident et lui attirait les bonnes grâces des États-Unis à l’ONU. Cela conduisit Portugal democrático à souligner, dans le numéro de décembre 1958, que l’UPI (United Press International), agence internationale d’information qui avait son siège aux États-Unis, n’était que le docile instrument de l’ANI, l’organe au service de la propagande salazariste14.

Outre cet intérêt commun à se rapprocher des États-Unis, le Brésil voyait aussi dans les liens d’amitiés tissés avec le Portugal des intérêts électoraux. En effet, dans les années 50, de nombreux Brésiliens d’ascendance portugaise jouissant d’une position influente étaient restés attachés au régime salazariste. Kubitschek qui comptait briguer un deuxième mandat pensait que ces voix lui seraient particulièrement précieuses pour sa réélection.

Bien évidemment, tous les Brésiliens ne se montraient pas aussi admiratifs du régime salazariste. Kubitschek dut maintes fois s’opposer aux nationalistes qui n’admettaient pas cette complicité avec un pays colonialiste, ancien colonisateur du Brésil de surcroît.

Le conflit entre les deux tendances éclata lors de la demande d’asile du général Humberto Delgado à l’Ambassade brésilienne à Lisbonne. Le général Delgado, principal opposant à Salazar, avait osé se présenter en 1958 aux élections présidentielles contre le candidat du régime salazariste, Américo Tomás. Il fut bien évidemment battu par ce dernier, de manière tout à fait frauduleuse ; Portugal democrático se fit l’écho de cet évènement dans son numéro de février 1959 en titrant en première page : « O Brasil apoia Delgado contra Salazar ». Après les élections, le « general sem medo » – comme il était surnommé –, poursuivi par la PIDE, décida de demander asile à l’Ambassade brésilienne de Lisbonne.

La presse portugaise, soumise à la censure et acquise de toute façon au régime salazariste, ne put que commenter l’évènement dans le sens indiqué par le pouvoir. En revanche, Portugal democrático relata cet épisode de façon tout à fait objective allant jusqu’à mettre en cause l’attitude même du gouvernement brésilien. En effet, si l’ambassadeur brésilien Álvaro Lins reçut Humberto Delgado dans le total respect des normes internationales du droit d’asile, l’attitude du Ministère des Affaires Extérieures (Itamaraty) ne fut pas aussi transparente. Le journal n’hésita pas à encenser l’ambassadeur et à interpeller le ministre des Affaires Extérieures brésiliennes en l’accusant d’une inertie suspecte :

O Ministro Negrão de Lima, que é tido como uma personalidade hábil, parece não se dar conta que em todo êsse episódio não é apenas a sua ilustre pessoa que se encontra em jogo. A timidez com que se conduz no trato com o govêrno do sr. Oliveira Salazar, numa questão em que, de saída, a razão está com o Brasil, pode muito bem ser tomada como um retrato da nossa diplomacia. Até aqui a política externa brasileira tem contrariado tôdas as suas tendências naturais, para servir ao colonialismo português15.

Humberto Delgado gênait Kubitschek qui voulait à tout prix maintenir de bonnes relations avec le Portugal mais qui, parallèlement, ne pouvait pas afficher à la face du monde ses propres contradictions.

Un an auparavant, en 1958, Kubitschek avait lancé l’Opération Pan-américaine qui se donnait pour but de supprimer la misère, de contenir l’expansion du communisme et de développer les démocraties grâce à un travail en commun de tous les pays du continent américain et surtout grâce à l’aide financière des États-Unis. Comme le souligne si justement l’historien Waldir José Rampinelli, Kubitschek revendiquait, à travers cette opération, des principes comme « a autodeterminação, a não-intervenção, a soberania, o nacionalismo e a democracia representativa »16 alors qu’en même temps il n’hésitait pas à défendre les thèses colonialistes de Salazar.

Dans le cas Delgado, Kubitschek se trouvait dans une impasse ; il décida donc de faire traîner les choses, d’autant plus que la presse brésilienne se faisait l’écho de toute cette triste affaire et critiquait l’attitude intransigeante de Salazar, comme ne manqua pas de le rappeler Portugal democrático :

O « caso Delgado » teve assim, entre outras, o mérito de vir provar que – todo o Brasil – os escritores, os jornais, a rádio, a televisão, o homem da rua – está ao lado da Nação Portuguesa na sua luta contra o Estado Novo e o seu chefe.17

Après des discussions qui durèrent plusieurs mois, Álvaro Lins réussit à faire sortir Delgado du Portugal et à le transférer au Brésil. Portugal democrático célébra l’évènement à la une (fig. 2) et relata de manière détaillée l’arrivée triomphale du « general sem medo » au Brésil, le 21 avril 1959 :

Fig. 2 - Portugal democrático, mai 1959 (collection particulière)

Fig. 2 - Portugal democrático, mai 1959 (collection particulière)

Bandeiras de Portugal e do Brasil tremulavam há longas horas no aeroporto do Galeão, quando o “DC-7C” da “Panair” desceu, na hora exata: 12h45. Os portugueses vivem intensamente cada segundo que passa. O General aparece, as bandeiras são frenéticamente agitadas enquanto um só grito se repete e confunde, interminável: Portugal! Delgado! Brasil! Liberdade!

Os operadores do cinema e da televisão filmam, os “flashes” das máquinas fotográficas crepitam, a multidão de microfones aproxima-se do General.18

Diplomatiquement, le général Delgado manifesta immédiatement sa profonde reconnaissance au président brésilien pour la « forma varonil, nobre, humana e brasileira »19 dont il avait fait preuve en souscrivant à l’action de l’Ambassadeur Álvaro Lins lors de cette grave affaire.

Kubitschek s’en sortait donc sans trop de mal et s’attirait les grâces, du moins supposées, à la fois de Delgado et de Salazar. Toutefois, alors même que la crise n’était pas encore résolue, il acceptait l’invitation de Salazar à participer aux Fêtes nationales portugaises révélant ainsi sa duplicité. Le président brésilien fut reçu par Salazar avec tous les honneurs dus à un grand chef d’état.

Il semble bien que les liens entre Salazar et Kubitschek aient été indéfectibles ce qui explique que, dès son arrivée, Delgado et tous ceux qui l’appuyèrent furent étroitement surveillés par les polices politiques du Portugal et du Brésil, comme le prouve un document du 28 juillet 1960 adressé au directeur de la DOPS (Departamento de Ordem Política e Social) :

Senhor Diretor, esta autoridade da Ordem Política, realmente, vem acompanhando as atividades do cidadão português Humberto da Silva Delgado, desde que o mesmo chegou ao nosso país, tendo sido ele alvo, – e notadamente em nosso estado, – de todas as garantias policiais e políticas, muito embora, veladamente, desenvolva atividades políticas [...] em companhia de outros súditos, espanhóis e portugueses, contrários aos regimes em vigor em seus respectivos países.20

Outre le DOPS, des agents de la PIDE surveillaient également ces hommes, il y eut même des échanges d’information entre les polices politiques des deux pays21. Portugal democrático, dans son numéro de février 1961, ne se priva pas de dénoncer la présence de la police de Salazar au Brésil et en profita pour critiquer Kubitschek et sa complaisance envers le dictateur portugais :

A audácia do senhor Salazar, convencido de que o Brasil é uma chácara da sua propriedade, leva-o a despachar para terras brasileiras a fina-flor da canalha da PIDE, para levar a cabo as suas ordens. [...]

Entre nós, porém, o que ocorreu foi diferente. […] os homens da PIDE vieram como agentes policiais, para efetuar policiamento em pleno solo brasileiro. Em Santos não encontraram quem os desarmasse [...] no Rio de Janeiro puderam agir livremente, chegando a prender um cidadão.

O caso que assistimos vai muito além das normas usuais dos tratados entre as nações. O sr Juscelino, por exemplo, assinou um tratado de extradição com Portugal, recheado de cláusulas ambíguas destinadas a coartar o direito do Brasil de dar asílio a portuguêses condenados por delitos políticos. Contudo, nem nesse tratado, que é um modêlo de malícia, se previu a trasladação de agentes policiais de um país para outro a fim de apanhar no estrangeiro os inimigos do govêrno.22

La surveillance opérée par les organes institutionnels qu’étaient le DOPS et la PIDE, était intensifiée par une cinquième colonne formée par quelques diplomates et hommes d’affaires23. C’est donc tout naturellement que tous ces organismes s’intéressèrent à un autre personnage important de l’opposition salazariste : Henrique Galvão. Ce dernier fit à son tour la une de Portugal democrático à son arrivée au Brésil après le détournement du bateau de croisière portugais, le Santa Maria.

Comme Delgado, Galvão se rapprocha du journal dissident mais, très vite, il s’en éloigna car il estimait que le journal avait une ligne trop communiste et surtout qu’il était détaché de toute action révolutionnaire concrète. Galvão était un pur produit du salazarisme, comme Delgado d’ailleurs. Mais, au début des années 50, déçu par ses supérieurs et par Salazar lui-même, surtout par rapport à sa politique coloniale, il devint l’un de ses plus farouches opposants. Henrique Galvão se mit alors à critiquer les principaux dogmes de la politique coloniale salazariste basée à ses yeux sur un « centralismo político-administrativo e rígido controlo financeiro »24 le tout étouffé par la corruption.

Au cours de deux procès qui eurent lieu en 1952 et 1953, Henrique Galvão, accusé d’avoir conspiré contre le régime avec d’autres militaires, fut jugé, condamné et emprisonné25. En 1959, l’intrépide capitaine parvint néanmoins à s’évader de sa prison dans des circonstances rocambolesques. Il trouva par la suite refuge en Argentine puis au Venezuela.

Un an après, en janvier 1960, avec l’accord de Humberto Delgado, Henrique Galvão et des opposants espagnols26 au régime franquiste fondèrent le DRIL, Directoire Révolutionnaire Ibérique de Libération. Ce mouvement éphémère, il dura environ un an, eut toutefois des ramifications internationales importantes.

Les premiers attentats revendiqués par le DRIL eurent lieu à Madrid dès le mois de février 196027, mais l’action la plus spectaculaire, la plus médiatisée, fut le détournement du paquebot Santa Maria qui se déroula du 22 janvier au 2 février 1961. Les journaux du monde entier en parlèrent. Le magazine américain Life titrait « The seizure of Santa Maria High drama on the High seas », tandis que Paris Match affichait en couverture : « Exclusif : À bord de la Santa Maria – Photos et Récits – La fantastique aventure de Galvão et des pirates de la révolution. »

Fig. 3.- Paris Match, 4 février 1961

Fig. 3.- Paris Match, 4 février 1961

Fleuron de la marine marchande portugaise, le Santa Maria, parti de Lisbonne le 9 janvier 1961, devait faire route vers Miami avec plus de six cents passagers de diverses nationalités et trois cent soixante-dix membres d’équipage. Lors d’une escale à Curação dans les Antilles hollandaises, des membres du DRIL embarquèrent à bord du paquebot et, une fois parvenus en haute mer, s’en rendirent maître.

Du fait que le navire battait pavillon portugais, le commandement politique de l’opération – baptisée « Operação Dulcinéia » – avait été confié à Galvão. Le commandement militaire était quant à lui du ressort de José Fernández Vásquez, alias Jorge de Sotomayor, ancien commandant de la marine espagnole. L’objectif de Galvão était d’arriver en Angola et d’y trouver les appuis nécessaires pour créer un gouvernement révolutionnaire et mettre ainsi fin à partir de l’Afrique à la dictature salazariste. En réalité, comme le souligne D. L. Raby, « nunca ficou claramente esclarecido o objectivo final do assalto ao navio »28. Toutefois, les versions varient suivant les membres du commando29 dont la cohésion n’était apparemment pas exemplaire.

En outre, les plans primitifs furent rapidement compromis car, lors de l’attaque, il y eut un mort et deux blessés parmi l’équipage du paquebot. Après maintes discussions, les membres du commando tombèrent d’accord pour débarquer les deux hommes sur l’île de Sainte Lucy dans les Antilles Britanniques, afin de les faire soigner. Dans le numéro de Paris Match du 4 février 1961, le journaliste Robert Collin relate l’épisode de la sorte :

Un mystérieux paquebot apparaît au matin dans la rade de Santa Lucia, l’une des îles Sous-le-Vent, possession britannique. Personne ne l’attendait. Une chaloupe se détacha du bord. Elle transportait sept hommes. Quand ils arrivèrent au port, le paquebot levait l’ancre. Avec beaucoup de difficultés, car les anglais ne les comprenaient pas, les inconnus racontèrent leur extraordinaire aventure. Les mutins qui avaient pris possession de la Santa Maria avaient décidé d’évacuer les blessés de la nuit, car une courte lutte avait eu lieu avec les officiers du bord. L’un d’entre eux était même mortellement blessé.30

Ce fut donc pour des motifs humanitaires, que les chefs de l’Opération Dulcinéia révélèrent au monde « não só a sua localização, como também a existência de uma acção de revolta a bordo »31.

Rapidement informé, Salazar qualifia l’acte de piraterie et demanda l’aide de l’Angleterre et des États-Unis. Cette qualification fut immédiatement rejetée par Galvão dans un communiqué radio qui fit le tour du monde. Galvão y spécifiait bien qu’il ne s’agissait pas d’un acte de piraterie mais d’un acte purement politique d’opposition au régime salazariste. Paris Match, après avoir titré « Les pirates sont maîtres à bord. La folle croisière de la Santa Maria », rapporta les paroles de Galvão : « Nous ne sommes pas des pirates, mais nous luttons pour la liberté de notre patrie. »32

L’affaire prenait de ce fait une autre tournure : le paquebot étant considéré comme territoire portugais toute ingérence d’un pays étranger tombait sous le coup du droit international. Les États-Unis acceptèrent néanmoins d’endosser le rôle de négociateur dans le but déclaré de protéger leurs ressortissants à bord. À partir de là, commencèrent de longues négociations dans lesquelles le Brésil eut un rôle essentiel puisque le président fraîchement élu, Jânio Quadros, accorda l’asile à tous les membres de l’opération Dulcinéia.

Pour Portugal democrático même si le geste de Quadros était louable, il était loin d’être suffisant. Deux journalistes Oliveira Ferreira et Ruy Mesquita décidèrent alors de publier, en février 1961, une lettre ouverte au Président :

E contudo, senhor presidente, teria bastado um simples gesto mais ousado, dêsses que são tanto de seu agrado, para que, hoje, o único descontente fôsse o nobre Oliveira Salazar. [...] Teria bastado, senhor presidente, que ao invês de v. exa. e seu govêrno se terem limitado a obedecer aquilo que a lei prescreve, tivessem tido a coragem, juvenil e lúcida dos homens fortes, de fazer aquilo que a lei permite. Que invês de conceder asílio, o Brasil tivesse reconhecido a beligerância.

Ela reconhecida, senhor presidente, assistir-se-ia ao « Santa Maria » fundear em Recife não apenas para reabastecer-se e seguir sua rota, mas para revelar aos povos, como sua homônima jà o fizera um novo mundo e, o que é mais, para abrir a africanos e a asiáticos, a lusos e hispânicos (de aquém e além-mar) de par em par as portas da gloriosa aventura da libertação dos povos coloniais mercê de um mero gesto de ousadia e, porque não dizê-lo, de romantismo.

Sem dúvida, senhor presidente, além-mar o ditador tremeria e iracundo ameaçaria romper relações e fechar de vez ao comércio brasileiro os mercados de Angola e Moçambique, e impedir fôsse Macau transformado em entreposto nosso para o país da Grande Muralha. Mas, e v. exa. permita-nos dizer-lhe, as iras seriam meramente inconsequentes, se tivesse sido o « Santa Maria » do Galvão beligerante que revelasse aos povos da Asia, Africa, América e Ibéria que nem tudo estava perdido, porque aqui no seio da América a que a caravela homônima aportou à quase cinco séculos erguia-se o fanal da esperança que guiou nossos maiores, no desejo sincero de uns, interesseiro de outros, à descoberta, conquista e civilização da Africa e das Índias. [...]

Hoje, a oportunidade que o destino colocou em suas mãos – na figura dêsse homem que os anos de Africa, de cativeiro e de exílio marcaram para serem como herói – essa oportunidade de levar aos povos que clamam por libertação, a nossa mensagem de fé e esperança no porvir da Liberdade, parece ter sido perdida.33

Les deux journalistes commencent par réfuter l’argumentation de Salazar consistant à qualifier l’opération d’acte de piraterie et reprochent au président brésilien de s’être contenté de faire ce que tout dirigeant d’un pays démocratique aurait fait : c’est-à-dire accorder l’asile politique à des hommes en lutte contre un régime dictatorial. Ils regrettaient que Quadros n’eût pas adopté une position ferme face au Portugal en permettant au Santa Maria, rebaptisé Santa Liberdade par Galvão, de continuer jusqu’en Afrique. Il aurait suffi pour cela que le président brésilien acceptât de les aider financièrement afin de leur permettre de reprendre la mer et de mener à bien l’opération Dulcinéia.

Le rôle joué par le Brésil dans toute cette affaire est évident, mais qu’en est-il de celui des États-Unis ? Avec le recul de l’Histoire, il est difficile de ne pas faire un lien entre la position des États-Unis dans le détournement du Santa Maria et l’arrivée au pouvoir de John Fitzgerald Kennedy. Ce dernier, avant même son investiture, avait en sa possession un rapport, rédigé par une commission présidée par son frère Edward Kennedy, qui préconisait que « os Estados Unidos deviam abandonar a sua atitude de meros observadores dos fenómenos africanos e assumir uma posição de apoio ao nacionalismo emergente naquele continente »34. Le président nord-américain, conscient du pouvoir que l’Union Soviétique commençait à exercer sur le continent africain, décida alors stratégiquement de se tourner vers l’Afrique en adoptant une politique anticolonialiste.

L’opération Dulcinéia allait pour lui dans le bon sens car, si elle s’était donné pour objectif de mettre fin à la dictature salazariste, elle projetait également de rendre aux colonies leur autonomie ; du moins était-ce là le désir des Espagnols membres du commando. Pour Galvão, les choses étaient bien différentes : fervent antisalazariste, il restait fermement colonialiste.

L’attitude bienveillante des États-Unis face à Galvão dans le cas du Santa Maria présage d’une prise de distance avec le régime salazariste35. En effet, les États-Unis, qui s’étaient jusque-là montrés assez neutres face à la position colonialiste du Portugal, rejetaient dorénavant la thèse de Salazar qui prétendait que les possessions portugaises n’étaient pas des colonies mais des provinces d’outre-mer gérées exactement comme les provinces continentales.

Il fallut attendre le 15 mars 1961 pour que le changement de position des États-Unis s’affichât aux yeux du monde. C’est en effet à cette date que, pour la première fois, la délégation nord-américaine vota à l’ONU contre la politique africaine de Salazar. Ce vote qui fit grand bruit conduisit Portugal democrático à conclure, dans son numéro de juin 1961, que les États-Unis avaient abandonné Salazar à son triste sort36. En fait, « o posicionamento norte-americano abriu uma crise séria no relacionamento entre as duas nações que tão depressa não seria sanada. »37

Un bras de fer s’opéra alors entre Kennedy et le dictateur portugais38 pour que ce dernier coopère avec les Nations Unies dans la question épineuse du colonialisme. Une véritable crise éclata entre les deux pays provoquant au Portugal une sévère vague d’antiaméricanisme qui « atingira o seu clímax com a realização de uma manifestação em Lisboa junto à embaixada americana. »39.

Mais le Portugal n’avait pas dit son dernier mot ; il avait un atout considérable entre ses mains : la base aérienne de Laje située dans l’île de Terceira de l’Archipel des Açores. À la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les États-Unis avaient signé un accord avec le Portugal leur permettant d’utiliser cette base qui avait un rôle stratégique crucial dans leur politique internationale. En raison de sa situation en plein Océan Atlantique, elle constituait pour les nord-américains une passerelle vers l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique.

Or, l’accord signé par les deux états touchait à sa fin et devait être renégocié. Les États-Unis ne pouvaient se permettre de perdre cet atout et Salazar le savait pertinemment. De façon miraculeuse, les relations luso-américaines s’améliorèrent. Ainsi, le 11 décembre 1962, « a delegação americana nas Nações Unidas votou contra uma resolução exigindo que Portugal reconhecesse de imediato o direito à autodeterminação dos povos sob a sua administração »40. Suite à ce vote, Portugal democrático accusa Salazar d’être « dono absoluto [...] do govêrno de Portugal, mercê da tenebrosa política internacional dos Estados Unidos e da Inglaterra »41.

Cette reprise des relations entre le Portugal et les États-Unis s’accentua avec le président Lyndon Johnson qui, aux prises avec la guerre du Vietnam, ne voulait à aucun prix perdre la base aérienne des Açores. Par ailleurs, Salazar voulait démontrer aux États-Unis son ardeur à lutter contre le communisme, comme le souligne Pedro Manuel Santos, « Portugal viu nesse facto uma excelente oportunidade para fazer vingar o seu argumento de que era preciso combater o comunismo internacional em toda a extensão do globo. »42

Si le Portugal parvint à renouer avec les États-Unis, ses relations avec le Brésil se durcirent relativement à la question coloniale. De fait, Jânio Quadros, élu en octobre 1960 et investi le 31 janvier 1961, entreprit une nouvelle politique extérieure qualifiée d’indépendante43. Très peu de temps après son élection, il adressa un article à la revue Foreign Affairs44, dans lequel il soulignait son désir de se rapprocher de l’URSS, de Cuba et de l’Afrique, allant jusqu’à regretter d’avoir appuyé le colonialisme européen au sein de l’ONU.

Selon Quadros, les liens fraternels unissant le Brésil au Portugal étaient responsables d’un tel positionnement. C’est pourquoi, précisait-il, le Brésil s’opposerait dorénavant à toute forme de colonialisme car, selon lui, l’exploitation des Africains « pelo capital europeu é prejudicial à economia brasileira »45.

Le maître-mot était lancé : l’économie. Si le Brésil voulait ouvrir son économie au monde, il lui fallait rejeter les jeux diplomatiques qui servaient davantage ses alliés que le pays lui-même. Jânio affirmait ainsi : « Não estamos em posição de permitir a liberdade de ação de forças econômicas em nosso território, simplesmente porque essas forças, controladas do exterior, fazem o seu próprio jogo e não o de nosso país »46. La critique s’adressait au Portugal et surtout aux États-Unis et Quadros de conclure : « O primeiro passo para tirar proveito total das possibilidades da nossa posição no mundo consiste em manter relações normais: com todas as nações. »47

De tels propos ne pouvaient qu’effrayer les États-Unis convaincus que l’Amérique Latine risquait de devenir l’un des plus dangereux théâtres de la Guerre Froide48. Il leur fallait à tout prix éviter que le Brésil se laisse contaminer par Cuba ou la Russie. D’ailleurs, les États-Unis surveillaient de très près le nordeste brésilien susceptible de devenir un foyer d’idéologie communiste en raison de la misère profonde qui y régnait.

Accusé de pro-castrisme par l’armée et par les conservateurs, Quadros démissionna de la Présidence de la République en août 1961 et fut remplacé par son vice-président, João Goulart. Ce dernier décida de continuer la politique de son prédécesseur et même d’aller plus loin sur certains points. En 1963, Portugal democrático s’en fit le témoin en encensant la position franche adoptée par le président brésilien à l’ONU :

O Brasil deu ontem um importante passo para conquistar definitivamente o grupo de nações afro-asiáticas, ao votar a favor de uma moção apresentada pela Venezuela fazendo um novo e último apêlo a Portugal, para que respeite os compromissos assumidos ao ingressar na ONU reconhecendo a seus povos coloniais o direito à autodeterminação e à independência.49

Le journal en profita pour jeter l’opprobre sur l’Angleterre, les États-Unis et la France, les seuls pays qui s’étaient abstenus de voter la résolution du Venezuela50. Dans ce contexte de guerre froide, la politique de Goulart était étroitement surveillée par les militaires brésiliens et par les États-Unis51. Après une féroce campagne de presse anti-Goulart, le président brésilien fut renversé par un coup d’état militaire, en 1964.

Longtemps on soupçonna les États-Unis d’avoir appuyé le coup d’état brésilien, mais il n’y avait pas de preuves réelles. Ainsi, devant le Sénat de son pays, l’ambassadeur américain au Brésil, Lincoln Gordon ne craignait pas d’affirmer :

O movimento que derrubou o Presidente Goulart era 100 por cento – e não 99,44 – mas 100% um movimento puramente brasileiro... Nem a Embaixada Norte-Americana, nem eu, pessoalmente, tivemos qualquer participação no processo.52

Toutefois, en 1974, une jeune étudiante américaine de l’Université du Texas découvrit par hasard des documents « top secret » de la NSA récemment déclassifiés dans lesquels il apparaissait clairement que les États-Unis avaient joué un rôle dans la chute de Goulart53. Ainsi, l'enregistrement d'une conversation téléphonique entre Lyndon B. Johnson et le sous-secrétaire d'État George Ball démontre bien l'implication des nord-américains : « I think we ought to take every step that we can, be prepared to do everything that we need to do »54, déclarait le président à propos du renversement de João Goulart.

Tout avait commencé par un rapport de l’ambassadeur américain au Brésil dans lequel celui-ci informait Kennedy qu’une tragédie allait avoir lieu dans la nation la plus importante d’Amérique Latine. Selon Gordon, Goulart s’apprêtait à faire un coup d’état à l’image de ses deux héros politiques Vargas et Juan Perón :

Ponderando as evidências com o máximo de objetividade possível, parece-me cada vez mais claro que o objetivo de Goulart é perpetuar-se no poder através de uma repetição do golpe de Vargas em 1937, instaurando um regime semelhante ao peronismo, com seu extremo nacionalismo antiamericano. O perigo da tomada de poder pelos comunistas decorre da total incompetência de Goulart para compreender ou resolver sérios problemas econômicos, administrativos, e outros quaisquer. No caso de Goulart servir como testa-de-ferro para estabelecer um regime autoritário, ele poderá facilmente ser posto de lado, como o general Naguib no Egito, e abrir caminho para algum Nasser comunista.55

Bien plus tard, en 2005, dans une interview accordée à deux universitaires, Gordon lui-même reconnut finalement que ses conclusions étaient de simples spéculations.

Mais elles étaient suffisantes pour que la CIA et la marine nord-américaine montent la fameuse opération Brother Sam dans le but d’appuyer les militaires brésiliens putschistes en cas de problème, « a operação incluía uma força naval e abastecimento de petróleo, gasolina, e derivados, além de armas e munição para os conspiradores »56. Très certainement informé de ce qui se tramait, João Goulart décida de ne pas résister afin d’éviter toute effusion de sang. À partir de là, commença l’une des périodes les plus noires de l’histoire du Brésil : la dictature militaire de 1964 à 1985.

L’idéologie sécuritaire justifiait désormais tous les abus ; les communistes, tout particulièrement, furent la cible du nouveau régime mis en place par les militaires. Le DOPS qui jusque-là s’était essentiellement contenté de surveiller, élargit son champ d’action en recourant massivement à l’emprisonnement et à la torture.

La surveillance s’intensifia autour de Portugal democrático ; l’historienne Maria Izilda Santos de Matos retranscrit à ce propos l’un des rapports do DEOPS/SP :

O Ministério do Exército, nos envia relatório de informações, sobre investigações procedidas na Universidade de São Paulo, ocasião em que vinham sendo constatados movimentos “comunistas”, com a participação de alunos e professores daquele e de outros estabelecimentos de ensino, constando em um de seus tópicos, a participação do professor “comunista” VÍTOR RAMOS da Faculdade de Assis, o qual mantinha ligações com o professor BARRADAS DE CARVALHO, de nacionalidade portuguesa que na oportunidade integrava o dispositivo “comunista” da Universidade de São Paulo.57

Chose paradoxale, au cours de cette période dite des années de plomb, le journal, pourtant estampillé communiste, put continuer son travail de sape de la dictature salazariste bien que certains de ses collaborateurs comme Víctor da Cunha Rêgo, Manuel Sertório et Jorge de Sena aient préféré partir « por considerarem inviável uma atuação política a partir desse país. »58

Comment le journal a-t-il réussi à survivre dans ce contexte dangereux ? D’abord en adoptant la stratégie du silence sur les évènements intérieurs du Brésil59. Un simple examen des titres de Portugal democrático démontre que la situation intérieure brésilienne n’est jamais abordée de façon critique. En 1968, le journal osa néanmoins mettre en cause des accords culturels et commerciaux signés entre le Brésil et le Portugal le 7 septembre 1966 et ratifiés le 21 mars 1967. Toutefois, le ton était moins virulent qu’auparavant, le journaliste se contentant de souligner que ces accords « não correspondem aos interêsses da Nação portuguesa e que podem também vir a prejudicar o prestígio do Brasil em África »60. Il mettait en garde le gouvernement brésilien sur le fait qu’ils reposaient sur de fausses promesses du régime salazariste.

La deuxième raison de la survie du journal est due au fait qu’une partie des militaires revendiquait une idéologie nationaliste et ne pouvait décemment s’en prendre à un journal qui luttait contre le colonialisme. En somme, bien que défendant des idéologies opposées, le journal et la dictature militaire se rejoignaient sur la question du colonialisme. Ainsi, Portugal democrático publia en avril 1968 un article intitulé « Militares Brasileiros Contra o Colonialismo » dans lequel certains hauts gradés de l’armée brésilienne confiaient : « a posição do Govêrno brasileiro de não apoiar o colonialismo português está certa, pois o Brasil sabe que é impossível contrariar a natural evolução dos acontecimentos. »61

Il faut toutefois souligner que les militaires n’étaient pas tous contre le colonialisme ; le premier président de la dictature militaire, le général Castelo Branco, dans sa lutte contre les communistes se rapprocha des États-Unis, mais également du Portugal.

Il y eut une troisième raison à la survie du journal, la personnalité de son directeur : Otávio Martins de Moura. Ce dernier était brésilien, comme l’exigeait la loi régissant les organes de presse au Brésil, et il avait des amis, des amis précieux puisqu’ils étaient profondément anticolonialistes62. En outre, ceux-ci occupaient des postes importants au sein de la junte militaire, ce qui n’était pas négligeable.

Ce fut très certainement pour toutes ces raisons que le journal fut toléré, à condition bien entendu de ne pas pactiser avec la gauche brésilienne63. Ce qui conduisit Miguel Urbano Rodrigues à conclure :

Ocorreu assim uma situação paradoxal. Durante anos o Portugal Democrático foi no Brasil o único jornal – fora do âmbito da imprensa clandestina – em que se fazia apologia do socialismo e de movimentos de libertação nacional que recorriam à guerilha. Marx e Lênin eram citados elogiosamente nas suas colunas. Nas universidades dizia-se, com bom humor, que era português o único jornal de esquerda do Brasil.64

En 1974, alors même que la dictature militaire brésilienne amorçait une ouverture politique grâce au retour au système électoral et au jeu des partis politiques, la Révolution des œillets mit fin à la dictature salazariste. Portugal democrático sortit encore quelques numéros, mais il avait perdu sa raison d’être, celle d’être la voix des opposants au régime autocratique de Salazar puis de Caetano.

Le journal eut par ailleurs le grand mérite de permettre à ces quelques femmes et à ces hommes exilés de se reconstruire en terre pas totalement étrangère. En effet, si l’exil induit habituellement pour certains la perte de soi, comme le dit si justement le sociologue Yannis Kiourtsakis, pour ces Portugais du Brésil il ne représentait pas un éloignement tragique ni la perte total du lien avec leur pays d’origine.

Certes, ils étaient étrangers puisque la notion d’étranger – du moins dans l’acception de Julia Kristeva – possède bien un sens juridique désignant celui qui n’a pas la nationalité du pays. Mais ils étaient étrangers dans un pays possédant des liens historiques, linguistiques et culturels spécifiques avec le Portugal.

Même si le portugais du pays d’accueil était pour ces hommes et ces femmes une langue fantôme, c’est-à-dire, selon la terminologie d’Alain Fleischer65, une langue dont les différences de prononciation transforment leur propre langue et les plongent de fait dans un autre monde, il n’en reste pas moins que ces exilés portugais demeuraient unis au Brésil par une partie de leur histoire et de leur culture. De ce fait, ils ne pouvaient pas se dire totalement différents au sein du Brésil qui, à son tour, ne pouvait pas non plus les considérer comme totalement dissemblables. D’où l’existence d’un lien durable très fort entre les deux pays. La solidarité brésilienne avec les exilés éclatait partout dans la presse, comme le montre la une des journaux brésiliens.

Malgré ces ressemblances, ces dissidents du régime salazariste continuèrent à vivre la tragédie de leur pays non plus de l’intérieur comme auparavant mais cette fois de l’extérieur, car ils restaient profondément préoccupés par la vie politique portugaise. La joie de retrouver au Brésil la liberté perdue au Portugal n’était pas pour eux un facteur d’oubli, elle était entachée par la mémoire, une mémoire davantage liée à l’anamnésis qu’à la mnèmè.

Dans son ouvrage La mémoire, l’Histoire, l’oubli, Paul Ricoeur66 précise que les Grecs ont deux mots, mnémé et anamnésis, pour désigner d’un côté le souvenir, la mémoire qui surgit passivement et qui peut s’apparenter au pathos et de l’autre côté la mémoire comme objet d’une recherche, d’une quête. Dans ce cas précis, la mémoire à laquelle faisaient appel les membres de Portugal democrático dans leur nouvelle vie au Brésil était une mémoire volontaire et organisée.

Tous ces exilés, qui recouraient au journalisme pour continuer la lutte contre le salazarisme en terre étrangère, s’obligeaient à effectuer un travail de mémoire, une recherche active afin de mieux lutter contre le régime qui les opprimait. Ce travail de mémoire leur donnait une nouvelle raison de vivre et leur évitait de tomber dans un pathos improductif.

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Notes

1 Sur le thème du Brésil comme terre d’accueil voir l’article de Heloisa Paulo, « O exílio português no Brasil nas décadas de cinquenta e sessenta », Cadernos Ceru, vol. 23, n° 2, 2013, pp. 34-50, [En ligne] disponible sur http://www.revistas.usp.br/ceru/article/viewFile/56872/59851, consulté le 15 mai 2015. Retour au texte

2 Fernanda Suely Müller, « Brasil e Portugal em revista : a imprensa periódica na fronteira entre cultura e política », Amerika, 3, 2010, La Mémoire et ses représentations esthétiques en Amérique latine /2, § 35, [En ligne] disponible sur http://amerika.revues.org/1408, consulté le 15 mai 2015. Voir également Fábio Ruela de Oliveira, « Exilados portugueses na militância contra Salazar », Espaço Plural, Vol. 8, n° 16, 2007, [En ligne] disponible sur http://e-revista.unioeste.br/index.php/espacoplural/article/view/1460. Retour au texte

3 Portugal democrático, julho de 1956, p. 1. Dans toutes les citations, l’orthographe, la ponctuation et l’accentuation des textes originaux ont été conservées en l’état. Retour au texte

4 Selon Gilda Santos, « O Jornal Portugal Democrático – Demandas do literário em meio à proposta política », Légua & Meia – Revista de Literatura e Diversidade Cultural, n° 3, Feira de Santana, UEFS, 2005, p. 61, [En ligne] disponible sur http://leguaemeia.uefs.br/3/3_059-69_o_jornal.pdf, consulté le 19 mai 2015. Retour au texte

5 Douglas Mansur da Silva, A Ética da Resistência : os exilados anti-salazaristas do « Portugal Democrático » (1956-1975), Dissertação de Mestrado, Departamento de Antropologia Social, Instituto de Filosofia e Ciências Humanas, Universidade Estadual de Campinas, p. 76, [En ligne] disponible sur http://uc.pt/.../Tese_DouglasMansur daSilva.pdf, consulté le 13 juin 2015. Publié également sous le titre A Oposição ao Estado Novo no Exílio Brasileiro (1956-1974), Lisboa, Imprensa de Ciências Sociais, 2006. Retour au texte

6 Voir Pedro Manuel Santos, « Portugal e a NATO. A Política colonial do Estado Novo e os Aliados (1961-1968) », Relações Internacionais, n° 21, Lisboa, março 2009, [En ligne] disponible sur http://www.scielo.mec.pt/scielo.php?pid=S1645-91992009000100003&script=sci_arttext ; voir également Nuno Severiano Teixeira, « Da neutralidade ao alinhamento: Portugal na Fundação do Pacto do Atlântico », Análise social, vol. XXVIII (120), 1993, 1, 55-80, [En ligne] disponible sur http://analisesocial.ics.ul.pt/documentos/1223289808W3fUK8ss8Gz37OV3.pdf. Retour au texte

7 Sur l’œuvre journalistique de Maria Archer au Brésil, voir Elisabeth Batista, Entre a literatura e a imprensa: percursos de Maria Archer no Brasil, Tese de doutorado, Universidade de São Paulo, 2007. Retour au texte

8 Voir Armanda Manguito Bouzy, « Mémoires d’exil : Maria Archer, une femme antisalazariste au Brésil », Cahiers d'Études des Cultures Ibériques et Latino-américaines, n° 1, 2015, pp. 73-93, Dossier coordonné par Michel Bœglin, [En ligne] disponible sur http://cecil.upv.univ-montp3.fr/files/2015/03/cecil_ 1_2015.pdf. Retour au texte

9 Portugal democrático, fevereiro de 1957, p. 2. Retour au texte

10 Heloisa Paulo, « O Assalto do Santa Maria e o Desmoronar do Regime Salazarista em Portugal », Hist.R., Goiânia, vol. 16, n° 1, jan./jun. 2011, pp. 55-56, [En ligne] disponible sur www.revistas.ufg.br/index.php/historia/.../11050, consulté le 18 mai 2015. Retour au texte

11 Voir l’article de Waldir José Rampinelli, « A Política Internacional de JK e as suas relações perigosas com o colonialismo português », Esboços, vol. 15, n° 20, 2008, pp. 275-289, [En ligne] disponible sur https://periodicos.ufsc.br/index.php/esbocos/article/view/2175-7976.2008v15n20p275, consulté le 18 mai 2015. Retour au texte

12 Apud ibidem, p. 277 [Source : Portugal no Estrangeiro, Arquivo Nacional da Torre do Tombo (AN-TT), Arquivo Oliveira Salazar (AOS)]. Retour au texte

13 La pensée de Salazar – Politique et gouvernement. Discours prononcé par Son Excellence le Président du Conseil, Dr. Oliveira Salazar, à la cérémonie d'investiture des Présidents des Commission de District et des membres d'autres organes supérieurs de l'Union Nationale, le 19 Janvier 1956, Lisbonne, Secretariado Nacional da Informação, 1956. Retour au texte

14 Portugal democrático, dezembro de 1958, p. 5. Retour au texte

15 Portugal democrático, abril de 1959, p. 2. Retour au texte

16 Waldir José Rampinelli, op. cit., p. 279. Retour au texte

17 Portugal democrático, fevereiro de 1959, p. 1. Retour au texte

18 Idem, maio de 1959, p. 4. Retour au texte

19 Ibidem. Retour au texte

20 Alfredo Moreno Leitão, « Humberto Delgado, entre Brasil e Portugal », VII Simpósio Nacional de História Cultural. Humberto Delgado, entre Brasil e Portugal, 2014, p. 420, [Source: Documento 41-E-5-1, Fundo DEOPS-SP, Arquivo Público do Estado de São Paulo], [En ligne] disponible sur www.remessas.cepese.pt/.../Humberto%20Delgado,%20entre%20Brasil%, consulté le 14 mai 2015. Retour au texte

21 Voir Alexandre Felipe Fiuza, « Uma ponte sobre o Atlântico : os exilados e as relações entre as polícias políticas brasileira e portuguesa », Antíteses, vol. 7, n° 13, jan./jun. 2014, pp. 210-227, [En ligne] disponible sur http://www.uel.br/revistas/uel/index.php/antiteses/article/view/16205/14643, consulté le 15 mai 2015. Retour au texte

22 Portugal democrático, fevereiro de 1961, p. 3. Retour au texte

23 Idem, fevereiro de 1957, p. 2. Retour au texte

24 Nelson Moreira Antão e Célia Gonçalves Tavares, « Henrique Galvão e o assalto ao Santa Maria. Percurso de uma dissidência do Estado Novo e suas repercussões internacionais », Sapiens: História, Património e Arqueologia, n° 0, dezembro 2008, p. 89, [En ligne] disponible sur http://www.revistasapiens.org/Biblioteca/numero0/henriquegalvao.pdf, consulté le 21 mai 2915. Retour au texte

25 Voir Armanda Manguito Bouzy, « La métaphore contre l’oppression salazariste : Os últimos dias do fascismo português (1959) de Maria Archer », Revista Eletrónica Literatura e Autoritarismo – Dossiê n° 9, « Forças de opressão e estratégias de resistência na cultura contemporânea », Setembro 2012, pp. 100-125, [En ligne] disponible sur http://w3.ufsm.br/grpesqla/revista/dossie09/art_07.php. Retour au texte

26 Sur la longue tradition de solidarité entre les Portugais et les Espagnols en lutte contre leur dictature, voir Heloisa Paulo, « Exilados portugueses na América do Sul : republicanos e revolucionários (1926-1964) », Jornadas de trabajo. Exílios Políticos del Cono Sur en el siglo XX, pp. 1-17, [En ligne] disponible sur http://jornadasexilios.fahce.unlp.edu.ar/i-jornadas/ponencias/PAULO.pdf. Retour au texte

27 Voir D. L. Raby, « O DRIL (1959-1961). Experiência única na oposição ao Estado Novo », Penélope, 16, 1995, pp. 63-86, [En ligne] disponible sur dialnet.unirioja.es/descarga/articulo/2656591.pdf, consulté le 20 mai 2015. Retour au texte

28 Ibidem, p. 72. Retour au texte

29 Voir notamment les mémoires de Jorge de Sotomayor, Yo robé el Santa Maria, Madrid, Akal, 1978. Retour au texte

30 Paris Match, 4 février 1961, n° 617, p. 29. Retour au texte

31 Nelson Moreira Antão e Célia Gonçalves Tavares, op. cit., p. 95. Retour au texte

32 Paris Match, op. cit., p. 32. Retour au texte

33 Portugal democrático, fevereiro de 1961, p. 3. Retour au texte

34 Luís Nuno Rodrigues, « “Orgulhosamente sós”? Portugal e os Estados Unidos no início da década de 1960 », Comunicação apresentada ao 22º Encontro de Professores de História da Zona Centro, Caldas da Rainha |Abril de 2004|, p. 7, [En ligne] disponible sur http://www.ipri.pt/investigadores/artigo.php?idi=8&ida=140, consulté le 25 mai 2015. Retour au texte

35 Voir Norrie Mac Queen, A Descolonização da África Portuguesa, Mem Martins, Editorial Inquérito, 1998. Retour au texte

36 Portugal democrático, junho de 1961, p. 8. Retour au texte

37 Luís Nuno Rodrigues, « “Orgulhosamente sós”? Portugal e os Estados Unidos no início da década de 1960 », op. cit., p. 8. Retour au texte

38 Voir José Freire Antunes, Kennedy e Salazar. O leão e a raposa, Lisboa, Difusão Cultural, 1991. Retour au texte

39 Luís Nuno Rodrigues, « Os Estados Unidos e a questão portuguesa colonial na ONU (1961-1963) », in Portugal, os Estados Unidos e a África Austral, ed. Manuela Franco, Lisboa, IPRI/Fundação Luso-Americana para o Desenvolvimento, p. 69, [En ligne] disponible sur http://www.ipri.pt/eventos/pdf/FLAD05_LNR.pdf, consulté le 25 mai 2015. Retour au texte

40 Ibidem, p. 84. Retour au texte

41 Portugal democrático, maio de 1968, p. 4. Retour au texte

42 Pedro Manuel Santos, op. cit., p. 10. Retour au texte

43 Voir Joice Petry et Luara Mayer, « Política Externa Independente e descolonização: Posições do Brasil na ONU frente aos territórios de dominação portuguesa na África », Noctua. Revista de História, n° 2, 2010, n. p., [En ligne] disponible sur http://periodicos.unb.br/index.php/noctua/article/viewArticle/1079, consulté le 25 mai 2015. Retour au texte

44 Jânio Quadros, « A Nova Política Externa do Brasil », Revista Brasileira de Política Internacional, Rio de Janeiro, ano IV, n° 16, dezembro de 1961, pp. 150-156, [En ligne] disponible sur http://brasilrepublicano.com.br/fontes/31.pdf, consulté le 10 mai 2015. Retour au texte

45 Ibidem, p. 7. Retour au texte

46 Ibidem, p. 5. Retour au texte

47 Ibidem, p. 8. Retour au texte

48 Voir Ricardo Alaggio Ribeiro, A Aliança para o Progresso e as Relações Brasil-Estados Unidos, Tese de Doutorado apresentada ao Departamento de Ciência Política do Instituto de Filosofia e Ciências Humanas da Universidade Estadual de Campinas, p. 110, [En ligne] disponible sur http://ggnnoticias.com.br/sites/default/files/documentos/ribeiroricardoalaggio.pdf, consulté le 25 mai 2015. Retour au texte

49 Portugal democrático, setembro de 1963, p. 5. Retour au texte

50 Ibidem. Retour au texte

51 Voir Adriana Cristina Borges e Luís Antônio Cabello Norder, « Tortura e violência por motivos políticos no regime militar no Brasil », VII Seminário de Pesquisa em Ciências Humanas, Londrina, 2007, pp. 1-12, [En ligne] disponible sur http://institucional.educacao.ba.gov.br/.../adriana-borges-e-luiz-antonio-norder-tortura-e-violencia-por-motivos-politicos%20(2).pdf. Retour au texte

52 James N. Green, Abigail Jones, « Reinventando a história : Lincoln Gordon e as suas múltiplas versões de 1964 », Revista Brasileira de História, vol. 29, n° 57, 2009, p. 68, [En ligne] disponible sur http://www.scielo.br/pdf/rbh/v29n57/a03v2957.pdf, consulté le 26 mai 2015 [Source : United State Senate. Committee on Foreign Relations, Nomination of Lincoln Gordon to be Assistant Secretary of State for Inter-American Affairs, 89th Congress, 2nd Session, Washington : GPO, February 7, 1966 : 44]. Retour au texte

53 Ibidem, p. 69. Retour au texte

54 National Security Agency, Brazil Marks 40th Anniversary of Military Coup. Declassified Documents Shed Light on U.S. Role. Edited by Peter Kornbluh, peter.kornbluh@gmail.com / 202 994-7116, [En ligne] disponible sur http://nsarchive.gwu.edu/NSAEBB/NSAEBB118/, consulté le 26 mai 2015. Retour au texte

55 James N. Green, Abigail Jones, op. cit., p. 74 [Source: Ambassador Lincoln Gordon to Secretary of State Dean Rusk, 21 August 1963, n° 373, Brazil: August 1963, National Security File, John F. Kennedy Library]. Retour au texte

56 Ibidem, p. 81. Retour au texte

57 Maria Izilda Santos de Matos, « Portugal Democrático: debates e ações. Exílios e Resistências antissalazaristas em São Paulo/Brasil (1958-1977) », II jornadas de trabajo. Exilios Políticos del Cono Sur en el Siglo XX, 2014, n. p., [Source : SSP/SP, Dependência Serviço de Informações, doc. 52z0 (4372), Vitor Ramos. Acervo DEOPS/SP] [En ligne] disponible sur http://jornadasexilios.fahce.unlp.edu.ar/ii-jornadas/actas-2014/Matos.pdf, consulté le 26 mai 2015. Retour au texte

58 Douglas Mansur da Silva, op. cit., p. 121. Retour au texte

59 Ibidem, p. 127. Voir également Guido Fabiano Pinheiro Queiroz, « A jangada Aporta. O exílio no Brasil e o projeto de um Portugal flutuante », in Os Espelhos de Barradas de Carvalho. Crônica Política e Historiografia de um exilado, Dissertação de Mestrado, Pontifícia Universidade Católica do Rio de Janeiro, agosto de 2008, p. 58, [En ligne] disponible sur http://www.maxwell.vrac.puc-rio.br/13117/13117_4.PDF, consulté le 26 mai 2015. Retour au texte

60 Portugal democrático, abril de 1968, p. 3. Retour au texte

61 Ibidem, p. 4. Retour au texte

62 Douglas Mansur da Silva, op. cit., pp. 133-134. Retour au texte

63 Ibidem, p. 133. Retour au texte

64 Miguel Urbano Rodrigues, « Portugal Democrático – um jornal revolucionário », in A missão portuguesa : rotas entrecruzadas, Lemos, Fernando & Leite, Rui Moreira (orgs.), São Paulo, Editora da Unesp e Edusc, 2003. Retour au texte

65 Alain Fleischer, L'Accent. Une langue fantôme ?, Paris, La Librairie du XXIe siècle, 2005. Retour au texte

66 Paul Ricœur, La mémoire, l’Histoire, l’oubli, Paris, Seuil, 2000. Retour au texte

Illustrations

Citer cet article

Référence électronique

Armanda Manguito Bouzy, « D’une dictature à l’autre. Portugal democrático : la voix des exilés portugais au Brésil dans le jeu des relations internationales (Brésil – Europe – Etats-Unis) », Reflexos [En ligne], 3 | 2016, mis en ligne le 25 mai 2022, consulté le 27 avril 2024. URL : http://interfas.univ-tlse2.fr/reflexos/824

Auteur

Armanda Manguito Bouzy

Maître de Conférences

Université de Nice Sophia Antipolis

manguito@unice.fr

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